Charte du constructeur BIO

Préambule

Cette Charte a pour objet de définir ce qui est acceptable pour Nature & Progrès sous la dénomination d’« écobioconstruction ». 

La méthode mise en œuvre s’inspire de celle qui a été adoptée historiquement pour l’élaboration des cahiers des charges de l’agriculture biologique. 

1. Dans un premier temps, un comité d’information, constitué de professionnels et de consommateurs, formule l’idéal à atteindre en la matière. Ce comité rédige le texte de base de la Charte en définissant les principes vers lesquels il faut tendre. Une première série de normes techniques, ayant comme fonction de rendre applicables les lignes directrices, est exprimée. 

Une fois le texte accepté, il n’est plus possible d’en modifier les lignes directrices, au niveau du comité de suivi de la charte. 

2. Dans un second temps, un comité de suivi de la charte, toujours composé de professionnels et de consommateurs, élabore (ou actualise) les normes techniques qui traduisent, en termes opérationnels, l’idéal formulé par le comité d’information. 

D’éventuelles dérogations, ou des périodes de tolérance limitées dans le temps, peuvent être prévues. Ces normes et dérogations sont nourries d’apports scientifiques et seront évaluées sur base d’une efficacité technique ; elles supposent évidemment une large consultation des professionnels et de toute personne concernée. 

3. Dans le plus long terme – le texte est conçu comme évolutif -, dès que l’ensemble des normes techniques reflète suffisamment les lignes directrices et que leur applicabilité paraît possible, la création d’un comité de contrôle peut être envisagée. Son rôle sera de vérifier la bonne application de la Charte par ses signataires. 

Ce texte permettra donc de défendre, à l’extérieur, la philosophie de 
l’ « écobioconstruction » telle que l’envisage Nature & Progrès et de prévenir, sur des bases claires et partagées au nom de l’association, d’éventuelles dérives de la construction écologique.

Valeurs fondamentales
  • Respect de l’homme et de l’environnement,
  • Importance de la notion de temps : les générations futures sont une donnée primordiale,
  • Conformité à la notion de Développement Durable et aux trois dimensions conjointes : sociale, environnementale et économique.
Lieu de la construction

Les pouvoirs publics doivent garantir au candidat acquéreur l’accès à toute l’information relative au lieu : cartographie, connaissance des régions polluées… L’acquéreur doit avoir connaissance de toutes les nuisances existantes ou prévisibles, qu’elles soient naturelles (zones inondables, infiltration de radon…) ou artificielles (implantation d’une route…).

Une expertise géobiologique est indispensable dans tous les cas. Un bottin public de toutes les analyses déjà réalisées doit être mis en place et cumulé avec les essais de sol.

Du point de vue de la mobilité, un niveau acceptable d’accessibilité du lieu doit être garanti : existence de transports en commun et de services de proximité.

Le lieu doit permettre une intégration acceptable de l’habitation.

Architecture, urbanisme & aménagement du territoire

AU NIVEAU URBANISTIQUE :

Il faut favoriser l’urbanité et repenser la vie dans les villes dans le sens d’une plus grande proximité des services. Des sous-ensembles de 50.000 habitants, par exemple, donnent une échelle urbaine intéressante dans le cas de créations de villes nouvelles.

Il faut favoriser la rénovation plutôt que la construction, favoriser la mixité des fonctions, favoriser le groupement des habitats, être attentif à organiser de bonnes mitoyennetés, favoriser les aménagements collectifs, au niveau de communes ou au niveau des habitants entre eux, en ce qui concerne l’épuration des eaux, les énergies, les échanges de services… 

Les pouvoirs publics doivent absolument garantir au candidat bâtisseur un droit de regard et d’intervention dans les planifications d’urbanisme et d’aménagement du territoire. 

De même, tout promoteur consultera les futurs habitants pour la conception du bâtiment. 

Des garanties minimales d’aménagements publics sont indispensables au niveau des quartiers (voiries, parcs…) ; il est nécessaire de tirer un profit maximal des données naturelles (climat, relief, végétation…). 

Il faut créer davantage de lien social au niveau des quartiers (intergénérationnel, interculturel…). Il faut donner des garanties pour marier mobilité et qualité de vie : accessibilité des vélos, restrictions quant à l’usage de la voiture… 

Il faut limiter les habitations en hauteur : trois ou quatre étages maximum. 

Il faut penser de critères de compensation en ce qui concerne l’orientation des bâtiments : tirer un profit maximal de la géographie (lumière, soleil) sans que tous les bâtiments doivent être identiques et / ou orientés dans le même sens…

AU NIVEAU ARCHITECTURAL :

L’acte de bâtir est un acte humain avant d’être un acte technique. Il faut donc maximiser le dialogue avec le futur habitant, généraliser le participatif. L’habitant doit se reconnaître dans le lieu, s’approprier le lieu. Sur cette base, l’architecte, dont le rôle est avant tout d’informer, doit travailler à une véritable responsabilisation de l’habitant. L’architecte doit savoir comment « fonctionne » la personne qui habitera ce qu’il construit ; il est un instrument pour optimaliser ce que l’habitant va vivre. Il ne doit pas se voir uniquement comme le dépositaire d’un savoir a priori, d’une certaine esthétique, d’un art de bâtir… 

En terme de coût, tout bâtiment doit être socialement abordable. C’est affaire de conception, de travail d’architecte. En terme de construction individuelle, l’investissement en main-d’œuvre personnelle peut être important à prendre en compte.

L’emploi de matériaux adéquats entre évidemment dans la pertinence de la conception globale du bâtiment. Tout matériau utilisé doit être sain, écologique, socialement abordable et maîtrisé techniquement.

EN TERME DE CONCEPTION ARCHITECTURALE, IL FAUT :

  • particulièrement en matière d’écobioconstruction, s’intégrer à l’environnement, au bâti local, ainsi qu’à l’architecture contemporaine,
  • favoriser la compacité du bâtiment (décourager, par exemple, le(s) garage(s) intégré(s) ou trop proche(s) du lieu de vie),
  • chercher des bâtiments évolutifs et anticiper la rénovation ultérieure,
  • appliquer au maximum les préceptes de la bioclimatique ou de la maison passive.
Matériaux

ILS DOIVENT ÊTRE SAINS :

Un matériau ne peut induire aucune nocivité pour la santé humaine, tant pour celui qui vivra là où ils sont utilisés que pour celui qui les fabrique, les met en oeuvre ou les recycle. En cas de doute, le Principe de Précaution est d’application. C’est toujours au fabricant (ou à l’importateur, ou au revendeur) qu’il incombe de démontrer l’innocuité d’un produit, préalablement à son introduction sur le marché, 

la « perspiration » est un élément essentiel de l’écobioconstruction. Le bâtiment, pour qu’il soit sain, doit laisser diffuser la vapeur d’eau. Un bâtiment en écobioconstruction ne peut donc avoir recours à des matériaux qui entraveraient cette indispensable « perspiration ».

ILS DOIVENT ÊTRE ÉCOLOGIQUES, C’EST-À-DIRE :

  • être issus de matières premières renouvelables ou, dans le cas de produits d’origine animale ou végétale, être issus de l’agriculture biologique,
  • être pauvres en « énergie grise » (produits d’origine locale, dont la fabrication nécessite peu d’énergie, peu emballés…) ; le critère du label Nature + qui impose un minimum de 85% de matériaux minéraux et / ou renouvelables est retenu,
  • être réutilisables dans leur fonction première, ou recyclables,
  • n’être pas intoxicants pour l’environnement.

ILS DOIVENT ÊTRE SOCIALEMENT ABORDABLES :

  • être d’un prix abordable pour le bâtisseur,
  • être équitables, c’est-à-dire garantir la juste rémunération du producteur, par le biais, le cas échéant, d’une labellisation,
  • être un outil favorisant la production locale, favorisant la promotion d’emplois locaux.

Les pouvoirs publics doivent cependant favoriser le développement de produit de qualité afin de permettre à terme la diminution de leur prix. 

Il appartient au fabricant (à l’importateur ou au revendeur) de permettre la maîtrise technique du matériau qu’il met sur le marché, tant au niveau de la conception qu’il permet que de sa mise en œuvre proprement dite. Une information transparente doit donc être donnée à l’utilisateur ; le produit doit être étiqueté en donnant la liste complète de ses composants, ainsi qu’une notice précise de l’utilisation qui peut en être faite.

Mise en oeuvre

1. Légalement, un cahier des charges technique est fourni par l’architecte à l’entrepreneur. Il suppose une bonne connaissance des matériaux et de leurs applications et constituera l’élément fondamental d’évaluation du bâtiment en terme d’« écobioconstruction ». 

2. En terme d’organisation du chantier, la question des déchets de construction est primordiale. Ceci est toutefois compris dans les « énergies grises » spécifiques à la construction ou à la rénovation. Il faut prévenir au maximum les risques de pollution, trier les déchets pour les garder et les réutiliser sur place autant que faire se peut, ou à tout le moins faire appel aux filières adéquates de recyclage. Faire des feux sur le chantier est rigoureusement interdit ! Il faut veiller à utiliser les matériaux dans des modules Compatibles afin de limiter les découpes et les déchets. 

3. Concernant le terrassement, les fouilles doivent être limitées. Les caves doivent être limitées à ce qui est vraiment nécessaire. Aucune terre ne peut quitter le chantier : un déplacement strictement local des terres est un impératif. La terre arable doit absolument être remise en surface. La terre de terrassement pourra servir à fabriquer les enduits muraux. 

4. Concernant le gros œuvre et l’égouttage, un drainage correct est obligatoire. L’hygrométrie des murs est un facteur essentiel. De l’intérieur vers l’extérieur, il faut mettre des matériaux qui laissent mieux passer la vapeur d’eau. La qualité des mortiers est importante : il faut conseiller le mortier bâtard, et refuser le ciment à 100%. 

En ossature bois, la qualité de l’assemblage est très importante. Le bois doit être le moins possible en contact avec l’humidité. Le remplissage doit absorber les surplus d’humidité éventuels. 

Les systèmes naturels d’épuration des eaux domestiques (lagunage…) seront favorisés dans la mesure du possible. 

5. Charpente et menuiserie extérieure auront recours à des bois labellisés (FSC…), de production locale et provenant de forêts gérées de façon durable. 

Pour les châssis, on exclura évidemment le PVC. On veillera à ce que le coefficient d’isolation des châssis soit égal à celui du vitrage ; on s’assurera d’une étanchéité à l’air maximale. La pose évitera les ponts thermiques et exclura tout emploi de mousses de polyuréthane. 

6. Pour la couverture de toit, on proscrira les tuiles en béton et les produits à base de matières non renouvelables. 

7. En plomberie, l’objectif est de limiter les longueurs de tuyaux. Il s’agit d’abord de questions relatives à la conception : les pièces où il y a consommation d’eau chaude doivent se trouver au centre de la maison afin de limiter les déperditions de chaleur. Il faut encourager les systèmes de récupération de l’eau de pluie : citerne, groupe hydrophore, potabilisation… 

8. Concernant le chauffage, il faut privilégier :

  • le rayonnement par rapport à la convexion, par les murs plutôt que par le sol,
  • le chauffage à basse température et éviter les variations de température,
  • les solutions passives qui occasionnent le moins de chauffage possible.

En terme de combustible, priorité est donnée à tout ce qui est renouvelable. 
Le chauffage est évidemment lié à l’isolation, à l’étanchéité à l’air et à la 
« perspiration ». 

9. L’installation électrique doit limiter les champs électriques (5 volts/mètre en zone de repos, 10 volts/mètre en zone de travail) et magnétiques (2 milligauss pour toutes zones). 

Toute maison doit disposer d’une mise à la terre dont la résistance est inférieure à 7 Ohms. 

Une importance toute particulière doit être apportée à la conception des chemins de câbles. L’utilisation de câbles blindés VMVB et de bio-relais est recommandée, mais, dans le cas des maisons en bois cependant, ces recommandations deviennent des impératifs. 

L’information du consommateur est importante pour tout ce qui excède la construction proprement dite, notamment pour tout ce qui viendra « après la prise de courant » : choix des luminaires, etc. 

10. Concernant les enduits muraux, l’hygrométrie des murs est le facteur essentiel. 

Dans cette optique, le ciment, peu perméable à la vapeur d’eau, est à éviter, sauf dans les cas où le mur est directement en contact avec la terre. 

L’argile doit absolument être privilégié, compte tenu également du fait que cet enduit ne produit aucun déchet, tout étant réutilisable. Les enduits à base de chaux aérienne sont également performants. Le plâtre est moins cher et facile à mettre en œuvre, mais il convient d’être particulièrement vigilant quant à son contenu (adjuvants et pesticides). Il n’y a pas de contrôles sur le plâtre prêt à l’emploi. 

L’utilisation de la terre de terrassement pour fabriquer l’enduit mural est une solution optimale. 

11. Pour les carrelages, il faut préconiser l’usage de colle à base de chaux. 

12. La menuiserie intérieure doit comporter le moins possible de colle à urée-formaldéhyde. 

13. Le choix des peintures dépend de la nature des surfaces. On n’optera toutefois que pour des marques de peintures « naturelles » ou « écologiques » qui s’interdisent tout usage de produits issus de la pétrochimie. Des dérogations sont toutefois possibles dans les cas d’allergies.

Vie du bâtiment

L’estimation de la durée de vie du bâtiment est essentielle. Cette tâche incombe au coordinateur sécurité. Plus la durée de vie d’un bâtiment sera longue, plus la pression qu’il exerce sur l’environnement sera limitée. 

L’« habitabilité » du bâtiment, son côté vivable, son côté social, doit être optimale sa vie durant. Il est donc nécessaire de limiter le nombre d’étages et de compacter la construction. 

La capacité du bâtiment à évoluer en fonction des nécessités nouvelles qui sont susceptibles d’apparaître, son évolutivité en terme de rénovation, sa faculté à être modulé sont des qualités à favoriser, dès sa conception et tout au long des modifications qu’il est appelé à connaître. 

La limitation des déchets de rénovation tant en quantité qu’en qualité est une chose primordiale : la pression écologique du bâtiment, en finalité, peut s’exprimer en quantité globale de matériaux utilisés par personne et par an. Ceci doit pouvoir être évalué dès la conception.

PRODUITS EXCLUS :

  • d’une manière générale, tous les produits issus de la pétrochimie (PVC…), mais le polypropylène fait l’objet d’une tolérance dans le temps, aussi longtemps qu’une alternative valable n’aura pas été trouvée,
  • les produits contenant des fibres bio-persistantes : amiante, laine de roche, laine de verre…,
  • les produits dont la radioactivité est supérieure à 0,057 micro Sievert / heure,
  • les produits contenant du formaldéhyde à plus de 120 micro-grammes par mètre cube,
  • les produits biocides, fongicides, pesticides,
  • les produits contenant des solvants synthétiques,
  • les produits contenant des métaux lourds.
  • De nettes réserves sont formulées à l’égard de l’aluminium.

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