Le monde est en train de basculer. Pour ceux qui partagent cette évidence, il est indispensable d’échanger des vécus, des horizons, des pratiques, des idées, des récits et même des émotions. Les regards portés sur les grandes ruptures en cours peuvent être variés, voire contradictoires, car l’avenir est plus que jamais incertain. Cette rubrique explore comment les choses sont en train de changer.
Quatrième volet : analyse critique du mouvement zéro déchet, très tendance…
Il y a quelques années, un ami m’a fait découvrir un petit film amateur tourné, en 2004, à Buis-les-Baronnies dans la Drôme provençale. La caméra suit un homme exceptionnel, espiègle, rieur et simple. Un improbable héros obsédé par les objets jetés. Incapable d’accepter le sort qui leur est réservé, il les sauve et les collectionne. Tout : des vieux journaux, des livres, des hamburgers pourris, des roues de vélo, des téléviseurs, des frigos, des chaussures, par centaines, par milliers. Partout dans sa maison, à l’extérieur et même sur des terrains publics. Cette accumulation compulsive, aussi appelée syllogomanie, est considérée par les psychologues comme un trouble du comportement, parfois associé à une maladie plus large appelée “syndrome de Diogène”.
Folie ? Peut-être. Mais comme le préconisent certains anthropologues : pour comprendre une société, il faut s’intéresser à ce qu’elle rejette dans ses marges, à ce qu’elle laisse derrière elle, à ce qu’elle ne veut pas voir. Et si les syllogomanes, ces rassembleurs de “déchets”, nous parlaient de notre folie collective ?