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Le Bio inscrit son histoire dans le refus d’une agriculture chimique. En Belgique, les producteurs et consommateurs de Nature & Progrès ont été partie prenante de cette évolution. Animés par un idéal commun, ils ont alerté contre les dangers d’une agriculture chimique, fait connaitre et progresser l’agriculture biologique. Mais malgré le développement du Bio, les dérives de pesticides de synthèse s’accumulent dans l’environnement et contaminent l’air, les sols et les lieux de vie.

Si l’industrie de la chimie fabrique des produits de plus en plus toxiques (quelques dizaines de grammes à l’hectare pouvant suffire à éradiquer insectes et adventices), elle a jusque-là lamentablement échoué à innover pour contenir la migration de pesticides à risque hors des lieux de traitement.

En Belgique, l’irresponsabilité de l’industrie face aux dérives de leurs produits se combine à une administration permissive vis-à-vis des pesticides liés à des nombreuses maladies chroniques comme les cancers, ainsi qu’à des effets sur le système immunitaire, le développement cérébral, la thyroïde et les maladies neurodégénératives.

Des mesures anti-dérives qui ne protègent pas la population

L’exposition environnementale (non alimentaire) de la population wallonne aux pesticides a été analysée entre 2016 et 2018 (Propulppp et Expopesten). Les résultats de ces études ont confirmé la présence de pesticides à usage agricole dans les lieux de vie des wallons (cours d’écoles, salles de classe, jardins privés et habitations). Les enfants vivant dans des zones d’expositions sont contaminés par des insecticides perturbateurs endocriniens pouvant induire des problèmes de développement cérébral, autisme, obésité, diabète et cancers.

La campagne de biosurveillance wallonne menée en 2021 a révélé que plus de 90% des adultes et adolescents participants était contaminé par un produit de dégradation (métabolite) d’insecticides neurotoxiques susceptibles notamment d’altérer le développement cérébral du fœtus et d’affecter les apprentissages et le comportement ultérieur des enfants. Le glyphosate, interdit d’usage dans la sphère privée depuis juin 2017 (toujours utilisé par Infrabel pour désherber les chemins de fer), a été retrouvé dans un quart des échantillons. D’autres pesticides, bien qu’interdits depuis plusieurs décennies, ont également été détectés chez 20% des participants.

Comment en finir avec la dérive de pesticides hors des zones de traitement ?

Nature & Progrès s’investit pour mettre un terme à la contamination de nos paysages et de nos lieux de vie. Une cause partagée par d’autres organisations de protection de l’environnement comme nos partenaires wallons et européens : Canopea (ex IEW) et Pesticide Action Network Europe (PAN Europe). Ensemble, nous agissons sur deux plans :
– auprès des autorités fédérales pour les conditions d’autorisation des pesticides les plus nocifs
– auprès des autorités wallonnes pour les conditions d’utilisation de ces pesticides

Au fédéral, Nature & Progrès dénonce les conditions d’autorisations de pesticides nocifs pour la santé et l’environnement

Nature & Progrès intervient régulièrement pour dénoncer les autorisations abusives des pesticides les plus dangereux pour l’environnement et la santé et pour lesquels aucune mesure de réduction du risque n’est compatible avec les pratiques agricoles. C’est le cas du sulfoxaflor, un insecticide très toxique pour les abeilles, dont l’autorisation a été conditionnée à la gestion des plantes adventices visitées par les abeilles. Mais est-il réaliste d’attendre des agriculteurs qu’ils contrôlent la floraison des plantes adventices avant chaque pulvérisation ?

Avec PAN Europe, nous avons intenté trois actions en justice pour nous opposer aux dérogations d’insecticides interdits : les néonicotinoïdes tueurs d’abeilles. Celles-ci sont toujours en cours et ont été portées devant la Cour de justice de l’Union européenne.

Au niveau wallon, Nature & Progrès déplore une ambition de mise en œuvre très insuffisante

Bien que les grandes lignes encadrant l’utilisation des pesticides aient été définies dès 2018, Nature & Progrès déplore une ambition de mise en œuvre largement insuffisante :

  • les pulvérisations de pesticides sont interdites lorsque la vitesse du vent est supérieure à 20 km/heure alors que même les fabricants de pesticides les déconseillent au-delà de 18 km/heure
  • de même, la pulvérisation est interdite autour des lieux fréquentés par les publics sensibles mais rien n’est prévu pour les lieux d’habitation : un enfant est donc plus protégé dans une cour de récréation que dans son jardin ! De plus, les dit lieux n’ont pas encore été définis !

Conscients des manquements liés aux conditions d’utilisation des pesticides en Wallonie, nous avons contacté, dès son entrée en fonction, la Ministre wallonne de l’Environnement pour qu’elle organise la révision de cet Arrêté. A minima, nous souhaitons que soient précisées les conditions d’utilisation des pesticides et une interdiction de leur usage près des lieux d’habitation et de fréquentation par les publics sensibles.

Inquiets par la lente avancée de ce dossier et par le risque que cette révision ne soit plus possible sous cette législature, nous avons contacté la Ministre pour l’informer de l’urgence de continuer le travail entamé par ses prédécesseurs afin de rendre effectif l’Arrêté d’utilisation des pesticides et d’enfin garantir une gestion des conditions d’utilisation des pesticides.

Nature & Progrès s’interroge sur les modalités de contrôle des mesures anti-dérives en région wallonne

Le contrôle du respect de la mise en œuvre des conditions d’utilisation est également de la responsabilité de la ministre de l’Environnement de la Région wallonne.

Nature & Progrès a donc récemment adressé un courrier à la Ministre, lui demandant des précisions sur :

  • les modalités du contrôle de l’utilisation des pesticides
  • la manière dont ces mesures de prévention sont mises en œuvre par les utilisateurs de pesticides, notamment les mesures anti-dérives et le respect des distances de traitement
  • la mise en œuvre de conditions de protection des zones refuges pour l’entomofaune (haie, surface semée de plantes mellifères) en bordure de parcelles traitées
  • les résultats des contrôles effectués auprès des utilisateurs de pesticides durant les deux dernières années
  • la mise en place de mesures concrètes de protection de l’environnement et de la biodiversité

Il est également temps de responsabiliser les firmes fabricants les pesticides quant à la dispersion de leurs produits dans l’environnement : si la dérive d’un pesticide ne peut être contrôlée, ce pesticide ne devrait tout simplement pas être autorisé.