Marc Dufumier, agronome renommé, professeur émérite à AgroParisTech, conseiller auprès des Nations unies et de la Banque Mondiale, et président de la Plate-forme française pour le commerce équitable a répondu à l’invitation de Nature & Progrès, le vendredi 9 mai dernier. Il venait nous présenter son nouvel ouvrage, 50 idées reçues sur l’agriculture et l’alimentation, paru aux éditions Allary, un livre essentiel pour battre en brèche quelques redoutables a priori concernant notre alimentation. Nous avons eu le plaisir de converser librement avec lui…
Le scientifique et l’agronome qui a beaucoup bourlingué à travers le monde semble maintenant ressentir un grand besoin d’éducation populaire. Est-il aujourd’hui prioritaire de repenser son alimentation avec le consommateur ?
« Mon nouveau livre, explique Marc Dufumier, est d’abord le reflet de convictions politiques personnelles : il va falloir changer le monde et surtout en ce qui concerne l’agriculture, l’alimentation et l’environnement. Je pense qu’une véritable révolution technique est indispensable sans quoi nous allons droit dans le mur. Il ne s’agit nullement d’un retour en arrière mais d’un grand virage à nonante degrés ; ce n’est pas non plus un « grand soir » qui pourrait être violent mais davantage une transition que certains pourront qualifier d’écologique. On ne réussira ce changement drastique que si la grande majorité des consommateurs et des agriculteurs change d’attitude. Pour cela, il faut donc arriver à convaincre ! Dans un premier bouquin – Famine au Sud, Malbouffe au Nord -, je cherchais plus à interpeller les agriculteurs alors que, dans celui-ci, il s’agit plus de s’adresser directement aux consommateurs. La dimension politique est donc importante et ce n’est donc pas seulement le scientifique qui parle, même si mes convictions d’aujourd’hui sont le résultat de travaux menés scientifiquement avec des scientifiques, au sein d’une école – AgroParisTech – qui est loin d’être acquise à de telles idées. L’équipe que j’ai dirigée là-bas l’avait été autrefois par René Dumont, puis par Marcel Mazoyer dont j’ai pris la suite… ce n’est pas un hasard. »