Des niveaux élevés de TFA, un « polluant éternel »(PFAS), dans les céréales consommées au quotidien dans toute l’Europe

© Nature & Progrès, tous droits réservés

4 décembre 2025

Communiqué de presse

Une nouvelle étude de PAN Europe et de ses membres, dont Nature & Progrès, révèle des niveaux élevés d’acide trifluoroacétique (TFA), un polluant chimique éternel identifié comme toxique pour la reproduction, dans les céréales quotidiennement consommées à travers toute l’Europe.

Les aliments les plus contaminés sont les céréales classiques du petit-déjeuner. Les concentrations moyennes y sont 100 fois plus élevées que celles présentes dans l’eau du robinet. Le rapport montre que notre alimentation est une voie d’exposition humaine importante.

Nous appelons les régulateurs à fixer immédiatement un seuil de sécurité sur la teneur en TFA dans notre alimentation qui protège réellement les citoyen.nes et à interdire tous les pesticides PFAS et autres sources de TFA.

L’étude a analysé 66 produits céréaliers conventionnels achetés dans 16 pays européens, notamment des céréales pour le petit-déjeuner, des viennoiseries populaires, des pâtes, des croissants, du pain complet et raffiné, et de la farine. Elle s’appuie sur des rapports antérieurs faisant état de niveaux élevés de TFA dans les vins européens et d’une contamination généralisée de l’eau du robinet. Jusqu’ici, à notre connaissance, les autorités alimentaires ne surveillant pas la présence de TFA dans les aliments. Il s’agit de la première étude de ce type au niveau de l’UE.

Les principales conclusions de notre étude sont les suivantes :

  • Contamination généralisée des produits à base de céréales en Europe : le TFA a été détecté dans 81,8 % des échantillons (54 sur 65) prélevés dans 16 pays de l’Union européenne. 
  • Niveaux de contamination élevés : la concentration moyenne en TFA était de 78.9 μg/kg et des valeurs maximales pouvant atteindre 360 μg/kg. Les produits à base de blé sont nettement plus contaminés que les autres produits à base de céréales.
  • Les aliments, après l’eau potable, constituent la principale voie d’exposition au TFA:  le niveau moyen de TFA détecté, de 78,9 μg/kg est 107 fois supérieur à la concentration moyenne de TFA dans l’eau du robinet relevée dans notre étude précédente[1].
  • Il n’existe pas de LMR spécifiques de l’UE pour le TFA. Par conséquent, la LMR par défaut de 0,01 mg/kg (10 μg/kg) devrait s’appliquer. Pourtant, 54 échantillons ont dépassé cette LMR par défaut.

Une contamination dans tous les produits céréaliers commercialisés en Europe :

  •  360 µg/kg dans les céréales pour petit-déjeuner en Irlande
  •  340 µg/kg dans le pain complet belge
  •  310 µg/kg dans la farine de blé (produite en Allemagne)
  •  210 µg/kg dans une baguette française
  •  180 µg/kg dans un croissant français

« Tout le monde est exposé aux TFA par de multiples voies, notamment l’alimentation et l’eau potable. Nos conclusions soulignent la nécessité urgente d’interdire immédiatement les pesticides PFAS afin de mettre fin à la contamination de la chaîne alimentaire », a déclaré Salomé Roynel, chargée des politiques chez PAN Europe.

Le TFA, produit de dégradation des pesticides PFAS et des gaz fluorés, est extrêmement persistant et mobile. Il est de surcroît toxique pour la reproduction. Des études industrielles établissent également un lien entre ces composés et une baisse de la qualité du sperme, ainsi que des effets néfastes sur la thyroïde, le foie et les fonctions immunitaires. En raison de sa solubilité dans l’eau, le TFA s’accumule dans l’eau et les sols, où il est absorbé par les plantes.

Des études concordent sur le fait que le blé – céréales de base des européens – pourrait être particulièrement efficace pour accumuler le TFA, ce qui pourrait expliquer la forte accumulation de TFA observée dans des produits tels que le pain, les pâtes et les biscuits pour enfants.

« 81,8 % des échantillons dépassaient la limite maximale de résidus par défaut. Nous ne pouvons pas exposer les enfants à des produits chimiques reprotoxiques. Cela exige une action immédiate », a ajouté Angeliki Lysimachou, responsable des sciences et des politiques chez PAN Europe.

« Il est urgent d’interdire les sources d’émission de TFA en amont. Les Pesticides PFAS ne sont pas indispensables pour produire notre alimentation, or ils polluent notre eau et notre alimentation dans des proportions inquiétantes, exposant particulièrement les populations les plus vulnérables. C’est inacceptable. » déclare Virginie Pissoort, chargée de plaidoyer chez Nature & Progrès.

En marge de l’interdiction en amont, Nature et Progrès et ses partenaires au sein de PAN Europe réclament également de fixer un seuil de référence toxicologique pour le TFA qui protège les citoyen.nes, et de surveiller le taux de TFA dans l’alimentation.

Le rapport complet : Version en français. Version originale en Anglais

Pour en savoir plus :

Briefing sur les pesticides PFAS et le TFA

[1] L’enquête de Nature & Progrès et PAN Europe intitulée « TFA : Un Polluant éternel dans l’eau que nous buvons » (2024) a révélé une concentration moyenne de TFA de 740 ng/L dans 36 échantillons d’eau du robinet prélevés dans 11 pays de l’UE.

Le Conseil d’Etat annule 3 autorisations illégales de pesticides en Belgique

© Adobe Stock, tous droits réservés

27 novembre 2025

Communiqué de presse

Le Conseil d’Etat a jugé illégales trois autorisations données à des pesticides à base d’abamectine, un insecticide hautement toxique pour l’environnement et suspecté d’être génotoxique pour les humains[1]. Nature et Progrès Belgique, Bond Beter Leefmilieu et PAN Europe avaient mené l’affaire devant le Conseil d’Etat en 2024, suite à une prolongation de 15 ans de ces autorisations pour des usages en plein air et sous tunnel de l’Acaramik, du Vargas et du Safran par l’Etat alors que la Commission européenne avait restreint son usage aux seules serres fermées. “C’est la énième infraction du gouvernement fédéral concernant la législation sur les pesticides”, déclarent les trois organisations.

Lors du renouvellement de l’approbation européenne de l’abamectine en 2023[2], la Commission européenne a restreint aux seuls usages en serres hermétiquement closes cette substance et ce, afin d’empêcher toute fuite de cette substance hautement toxique pour la vie des sols et des milieux aquatiques. Certaines publications scientifiques pointent également l’aspect génotoxique et toxique pour la reproduction chez l’être humain. 

A la suite de cette réapprobation européenne de la substance active, la Belgique a renouvelé en 2024 les autorisations de pesticides à base d’abamectine pour des usages allant bien au-delà des restrictions imposées par l’Europe, pourtant claires, tant au niveau des durées de prolongations que des usages autorisés. 

« Agir de la sorte est illégal et donne le signal aux agriculteurs qu’ils peuvent poursuivre leurs pratiques, en les limitant le moins possible et le plus tard possible, nonobstant  les risques pour la santé des citoyens et notre environnement. Nous ne pouvions pas laisser passer ça » indique Virginie Pissoort, chargée de plaidoyer chez Nature & Progrès.

« Cela fait deux fois en deux ans que le Conseil d’Etat annule des décisions illégales de notre administration fédérale. Les exemples de mauvaise gouvernance y sont légion. Cette situation est inacceptable, de la part de fonctionnaires supposés veiller au respect de la législation, à la protection de notre santé et de l’environnement. » enchaîne Martin Dermine, directeur exécutif chez PAN Europe.

En effet, en 2023, la Belgique a également été condamnée par la Cour de Justice pour des autorisations d’urgence illégales concernant les néonicotinoïdes, qui sont extrêmement toxiques pour les abeilles[3].

La Belgique ne respecte systématiquement pas les restrictions européennes quant aux autorisations en milieu fermé:

Un certain nombre de pesticides particulièrement toxiques pour la santé humaine ou l’environnement sont restreints à une utilisation en milieu clos. Actuellement, le seul milieu de culture qui pourrait, techniquement, être considéré comme un milieu clos est la serre permanente de haute technologie.

Le SPF Santé Publique ne respecte pas les restrictions européennes: au lieu de restreindre l’autorisation de ces substances hautement toxiques à des milieux hermétiques, il les autorise dans de simples tunnels. En effet, le document de guidance[4] définissant une « culture sous protection » n’impose que la présence de parois latérales, d’un toit et la possibilité de s’y tenir debout. Les entrées/sorties, les voies de ventilations et les types de revêtements au sol ne sont pas mentionnés dans le document, ce qui signifie que de simples tunnels correspondent aux exigences du SPF.

« La définition belge d’un système fermé est insuffisante pour protéger notre environnement, laissant un risque trop important de contamination du sol, de l’eau et de l’air. Cette interprétation irresponsable de la législation européenne engendre des risques inacceptables tant pour l’environnement que pour la santé publique» souligne Heleen de Smet de Bond Beter Leefmilieu.

L’exemple de l’abamectine n’est malheureusement pas isolé. D’autres substances devraient être restreintes aux milieu hermétiquement clos mais ne le sont pas en Belgique, telle la quinoline-8-ol, un fongicide classé comme « toxique pour la reproduction catégorie 1B », pour lequel la législation européenne prévoit qu’aucun contact avec l’être humain ou l’environnement n’est autorisé.

Les pesticides utilisés dans ces cultures « sous protection » peuvent se disséminer dans l’environnement par les aérosols de pulvérisation via les ouvertures ou dans les sols.

« Ce non-respect du droit européen a déjà été signalé aux autorités qui n’ont aucunement l’intention d’y remédier. » précise Martin Dermine. 

Ces usages avaient dès lors été dénoncés dans les autorisations portées au Conseil d’Etat, conjointement avec le problème de durée des prolongations.

Pourquoi le Conseil d’Etat juge ces autorisations illégales ?

Lors de la réautorisation de ces pesticides à base d’abamectine en 2024, le SPF a délivré des « prolongations administratives », pour une durée de 15 années, tout en maintenant des usages en plein air, en flagrante contradiction avec les conditions imposées par le règlement européen sur l’abamectine. Lorsque l’administration prend du retard dans la ré-évaluation des autorisations nationales de pesticides, la législation européenne leur permet de prolonger les autorisations, le temps de finaliser l’évaluation, pas pour 15 années. Cette durée ne correspond pas à une « durée permettant de finaliser l’évaluation du pesticide » qui doit normalement se faire en 12 mois. Nature et Progrès Belgique, Bond Beter Leefmilieu et PAN Europe ont considéré qu’il s’agissait de prolongations définitives déguisées (premier moyen du recours).

Les plaignants avaient également mis en avant la problématique de non-respect de la restriction européenne à une utilisation en milieu fermé (2ème moyen). Dans la mesure où l’Etat était fautif sur base du premier moyen, le Conseil d’Etat n’a pas statué sur ce deuxième moyen.

« Nous regrettons que le Conseil d’Etat n’ait pas statué sur ce deuxième moyen. Nous attendons du SPF qu’il revoie les autorisations de tous les pesticides contenant de l’abamectine, sur les durées de prolongation, mais aussi afin de les restreindre aux espaces entièrement hermétiques. La pratique actuelle de l’administration de les autoriser en tunnel, ce qui n’empêche pas la contamination de l’environnement, est illégale. Nous continuerons à nous battre pour que le SPF respecte la législation »  conclut Virginie Pissoort.

[1] https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2025/11/arret-CE-18112025.pdf

[2] Règlement (UE) 2023/515

[3] https://www.natpro.be/actus/pesticides/pesticides-une-page-se-tourne/

[4] https://share.google/qa1cMtZ0K7NTlEW1F

 

Les instances politiques wallonnes, enfin prêtes à poser les premiers jalons pour protéger les ressources en eau des pesticides, affichent des ambitions différentes.

© Adobe Stock, tous droits réservés

25 novembre 2025

Communiqué de presse

Cette semaine la protection des captages d’eau est à l’ordre du jour du Parlement et du Gouvernement wallon. Objectif de part et d’autre : interdire la pulvérisation des pesticides chimiques aux abords des captages d’eau ; mais les périmètres de protection divergent. 

Jusqu’à ce jour, la protection des captages d’eau et donc des ressources en eau qui alimentent à 80% l’eau potable des wallons, contre la contamination par les pesticides chimiques, est concrètement nulle; à l’exception d’un périmètre restreint de 10m autour du point de captage où toute activité est interdite. Ce “permis de polluer” autour du captage est une hérésie dénoncée par Nature & Progrès et ses partenaires de longue date. 

A la faveur des crises PFAS des dernières années et d’un cycle d’auditions au Parlement wallon cet été sur les dommages sanitaires des pesticides, les instances politiques sont enfin prêtes à prendre des mesures concrètes d’interdiction de pulvérisation des pesticides, mais sur l’ambition, les positions divergent.  

Une proposition de décret déposée par l’opposition a été débattue ce mardi 25 novembre 2025 au Parlement.[1]. Elle vise à interdire totalement les pesticides dans l’ensemble de la zone de prévention autour des captages d’eau (zones IIA et IIB), une approche qui fait consensus dans la communauté scientifique.

Parallèlement, le ministre Coppieters (Les Engagés) a annoncé qu’il déposera ce jeudi 27 novembre au gouvernement un projet de décret qui sera débattu au gouvernement. Il veut interdire les pulvérisations de pesticides — sauf les biopesticides autorisés en agriculture biologique — uniquement sur la zone IIA et sur la zone IIB en région karstique, où la perméabilité est plus élevée à cause des fissures.

Cette initiative est certes plus volontariste que la motion de la majorité (MR–Engagés) signée en septembre dernier. En outre, le ministre de l’Environnement et de la Santé a précisé en Commission, en concertation avec le secteur de l’eau (SPGE), qu’une liste de 21 pesticides problématiques sera interdite sur toutes les zones IIB, ainsi que sur la zone III, celle qui alimente la nappe phréatique après plus de 50 jours. Le ministre a annoncé qu’il entendait également interdire l’utilisation des pesticides PFAS par les particuliers et les professionnels, une mesure complémentaire indispensable pour protéger les ressources en eau de ces polluants éternels.

Il convient toutefois de rappeler que les zones de prévention ont été établies pour éviter les pollutions accidentelles de la nappe phréatique. Elles sont délimitées soit selon les réalités concrètes d’approvisionnement, soit de manière forfaitaire. Cette délimitation se base sur le temps nécessaire aux substances pour pénétrer la masse d’eau : moins de 24 heures pour la zone IIA, et moins de 50 jours pour la zone IIB. Toutefois, dans les deux cas, les polluants finissent par atteindre la nappe. Dans la zone IIB, l’effet est simplement retardé dans le temps, qu’il s’agisse d’une zone karstique ou pas.

Aussi, Nature & Progrès alerte :

« Limiter la protection au périmètre II A autour des captages, c’est risquer de manquer l’effet recherché. La seule stratégie réellement efficace pour protéger la ressource en eau, réduire les coûts de dépollution et protéger la santé des wallons consiste à interdire l’ensemble des pesticides chimiques en amont sur l’ensemble des zones d’alimentation des captages. Bien entendu des mesures complémentaires d’accompagnement des agriculteurs doivent être adoptées en même temps. »  relève Virginie Pissoort, chargée de plaidoyer chez Nature & Progrès.

Le texte déposé par l’opposition n’a finalement quant à lui pas fait l’objet d’un vote ce jour au Parlement et a été reporté, dans l’attente des prochaines négociations au gouvernement. 

Nature & Progrès appelle les parlementaires et le gouvernement wallons à faire preuve d’ambition et de cohérence. 

[1] https://nautilus.parlement-wallon.be/Archives/2025_2026/DECRET/379_1.pdf

Les alternatives aux pesticides PFAS existent : l’agriculture biologique est la solution !

© Nature & Progrès, tous droits réservés

6 novembre 2025

Communiqué de presse

Alors que les PFAS, polluants éternels, contaminent nos sols, nos rivières et notre alimentation, Nature & Progrès Belgique tire une nouvelle fois la sonnette d’alarme : l’agriculture biologique offre déjà toutes les solutions pour se passer des pesticides PFAS ! L’association appelle les autorités à s’inspirer du Danemark et à interdire la mise sur le marché de tous les pesticides contenant des PFAS.

Un lien établi entre pratiques agricoles et présence de PFAS

En Belgique, 11 % des substances actives autorisées dans les pesticides sont des PFAS, ces composés chimiques persistants dont la toxicité est établie[1]. Selon les dernières études de PAN Europe, réseau européen dont Nature & Progrès est membre, il existe des taux élevés de TFA (dérivé de nombreux pesticides PFAS) dans les rivières européennes situées dans les régions à forte densité agricoles. En Wallonie, un prélèvement dans la Mehaigne avait révélé une contamination parmi les plus élevées de la quarantaine d’échantillons prélevés en Europe, et un monitoring exhaustif de l’eau de la distribution réalisé par la SWDE a déjà affiché des niveaux inquiétants de contamination[2] qui tendent à augmenter dans le temps dans les zones les plus sensibles. De nombreuses recherches montrent que l’eau, le vin, les fruits et légumes seraient aussi fortement contaminés par le TFA.[3]

En outre, la courbe de ventes de pesticides PFAS est en hausse et exponentielle pour les dernières années, ce qui doit d’autant plus nous inquiéter. 

Une réponse évidente : l’agriculture biologique

Alors que la Ministre wallonne de l’Agriculture, Anne-Catherine Dalcq, lance les Etats Généraux de la Protection des Cultures pour étudier les alternatives aux pesticides, Nature & Progrès rappelle que la solution est connue de longue date : l’agriculture biologique. Dans une nouvelle brochure consacrée aux pesticides PFAS, l’association dresse un état des lieux complet de leur usage en agriculture et met en lumière les alternatives concrètes déjà mises en œuvre dans les fermes biologiques. Aujourd’hui, en Wallonie, 12,3 % de la surface agricole utile est cultivée en bio. Ces fermes démontrent qu’il est possible de prévenir plutôt que guérir : allonger les rotations, choisir des variétés résistantes, préserver les sols, favoriser la biodiversité, … Ces pratiques permettent non seulement de se passer totalement des pesticides PFAS, mais aussi de restaurer la qualité de l’eau, de l’air et des sols tout en assurant des revenus durables aux producteurs et aux productrices.

Comme l’indique l’agriculteur Gwenaël du Bus dans le film de Nature & Progrès « Intensif »[4] : 

« En bio, il y a plus de boulot et beaucoup plus de technicité. Les gens ont parfois l’impression que c’est l’inverse : le producteur bio c’est la nature, ce qu’on faisait il y a 200 ans, c’est facile… et que le conventionnel, c’est de la technicité. C’est quasiment l’inverse. On doit être beaucoup plus techniques en bio : le désherbage doit être très fin, les machines bien adaptées, on doit avoir beaucoup plus de diversité de produits. »  

Une demande claire : stopper le problème à la source

Nature & Progrès appelle les autorités belges et européennes à interdire en amont la mise sur le marché de tous les pesticides contenant des PFAS, en cohérence avec le principe de précaution. Le Danemark a déjà montré la voie en interdisant plusieurs pesticides PFAS afin de protéger durablement ses eaux souterraines. Il est urgent que la Belgique suive cet exemple et qu’elle engage une transition agricole dans laquelle l’agriculture biologique est reconnue comme levier majeur pour la santé publique et environnementale. 

« Depuis plus de cinquante ans, l’agriculture biologique prouve qu’il est possible de produire de manière saine et autonome, sans dépendre de la chimie. Les solutions existent, pour prendre soin de notre santé et de notre environnement. Il est urgent d’en faire la norme. » souligne Julie Van Damme, Secrétaire Générale de Nature & Progrès. 

Télécharger la brochure complète :

https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2025/11/Brochure_stopper-les-pesticides-pfas-a-la-source.pdf

 

[1] Voir par exemple : European Environment Agency, (2019). Emerging chemical risks in Europe ‘PFAS’ , EFSA (2020), Risk to human health related to the presence of perfluoroalkyl substances in food, Sunderland et al. (2019), Environmental Health Perspectives, DOI: 10.1289/EHP4555, Grandjean et al. (2012), Journal of the American Medical Association (JAMA), DOI: 10.1001/jama.2012.12525, Barry et al. (2013), Environmental Health Perspectives, DOI: 10.1289/ehp.1205829, Agency for Toxic Substances and Disease Registry (ATSDR), Toxicological Profile for Perfluoroalkyls (2021). 

[2] Nature & Progrès réagit aux nouvelles informations sur la présence du TFA dans l’eau potable en Wallonie – Nature & Progrès

[3] Augmentation alarmante de la présence du TFA dans les vins européens – Nature & Progrès 

[4] https://www.natpro.be/intensif/ 

Odyssée pour notre santé : étape du 30 septembre à Gembloux

© Nature & Progrès, tous droits réservés

Ce mardi 30 septembre, l’Odyssée pour notre santé faisait étape à Gembloux. Les mutuelles de santé françaises sont à l’origine de ce projet, et d’autres acteurs, comme Nature & Progrès, les ont rapidement rejoint. L’objectif est de faire émerger en Europe un nouveau chapitre de la santé publique en promouvant un cap agricole sans pesticides.

Après une balade à vélo et en fanfare de Namur à Gembloux, le rendez-vous de la soirée chez Agricotiers a réuni près de 150 personnes ! Des animations et stands d’information (Nature & Progrès, la Mutualité Chrétienne, association de soutien aux victimes des pesticides…) accueillaient les participant.e.s.

Faits et témoignages en introduction

Pour introduire la table-ronde, plusieurs prises de parole. Pia Monville, coordinatrice d’Agricovert, a insisté sur l’importance de soutenir celles et ceux qui produisent en prenant soin du vivant. Elle a insisté sur la dimension de responsabilité et l’existence de solutions, et conclut en appelant au courage et à la conscience de croire encore et toujours dans un monde meilleur.

Martin Rieussec-Fournier, président des Mutuelles pour la santé planétaire, a salué les pionniers qu’étaient Nature & Progrès. En effet, c’est en réaction au livre « Printemps silencieux » de Rachel Carson, publié en 1962 pour alerter sur la dangerosité des pesticides, que Nature & Progrès (France) s’est créé, deux ans plus tard. Il a rappelé l’objectif : que la terre soit habitable pour une vie digne et heureuse. Martin Rieussec-Fournier a également appelé à la solidarité pour « La fabrique à sucre » à Cambrais, une initiative qui vise à créer une filière de sucre avec des betteraves bios, et qui rencontre actuellement des difficultés de financement. Rendez-vous le 6 octobre au « Serment de Cambrais » pour soutenir nos voisin.e.s !

Nous avons ensuite écouté le témoignage de Gisèle qui illustre les liens entre l’utilisation de pesticides et la maladie de Parkinson. Ce rapport de cause à effet est formellement reconnu en France, puisque Parkinson est reconnue comme maladie professionnelle pour les agriculteurs.

Agnès Chapelle, représentante de la Mutualité Chrétienne, a conclu l’introduction en rappelant de nombreux éléments factuels, comme la mauvaise qualité de l’eau en Wallonie ou les résultats des biomonitorings wallons réalisés par l’ISSeP (99% des urines des enfants montrent des traces d’au moins un insecticide). Pour les mutualités de santé, l’intérêt de l’alimentation bio pour la santé est indéniable : il est donc essentiel de travailler sur son accessibilité.

Table-ronde

La table ronde qui a suivi devait réunir Anne-Catherine Dalcq, Ministre wallonne de l’Agriculture, et Yves Coppieters, Ministre wallon de la Santé de l’Environnement. Malheureusement, les Ministres ont été retenu.e.s par le conclave budgétaire. Leurs représentants respectifs ont pris le relais. Virginie Pissoort, experte pesticides chez Nature & Progrès, introduisait les prises de parole , animées par Yves Raisière, rédacteur en chef de Tchak!, sur base de questions récoltées lors d’une consultation citoyenne.

Virginie Pissoort a rappelé un ensemble de faits et d’engagements marquants : les chiffres du bio et l’écart avec les objectifs annoncés (12% de surfaces agricoles utiles en 2024 alors qu’on en voulait 30% en 2030 en Wallonie), les objectifs du PWRP, le soutien insuffisamment ciblé à l’agriculture biologique, la lasagne législatives wallonnes et européennes qui résulte finalement en une non protection efficiente des citoyens.

Comme en réponse à l’introduction, les représentant.e.s des Ministres ont insisté à plusieurs reprises sur l’importance de casser le mythe du « bio trop cher ». Une perspective que rejoint totalement Nature & Progrès.Le représentant du Ministre de l’Environnement a rappelé qu’avec la crise médiatique des PFAS, c’était la première fois qu’il y avait une telle preuve de l’ampleur de l’impact potentiel des pesticides. Il a également insisté sur la capacité du bio à « faire de la masse », comme on l’a vu dans le stand Tomorrow Food à la Foire de Libramont (ou encore dans notre film Intensif, à voir et à revoir). Il soulignait par ailleurs la nécessité de cibler les actions : plutôt que d’interdire tout épandage de pesticides dans un rayon de 3 km, il vaut mieux prendre des mesures utiles aux bons endroits.

Sur la centaine de questions reçues pour préparer la table-ronde, toutes n’ont pas pu être abordées. On peut regretter que la question proposée par Hugues De Bolster reste sans réponse : « Est-ce qu’on n’est pas dans un Hiroshima silencieux ? Et est-ce que la réaction des hommes et des femmes politiques n’est pas de mettre la tête dans le sable, exactement comme on a fait pour l’amiante ? »   

La suite ?

Les Etats généraux de la protection des Cultures, une initiative de la Ministre Anne-Catherine Dalcq, devraient commencer le 31 octobre prochain. Nature & Progrès continuera évidemment à suivre ces discussions de très près.

Aux revendications européennes globales de l’Odyssée pour notre santé, des acteurs belges ont formulé une série de demandes propres à la Wallonie et à la Belgique visant à ancrer ce changement de cap. 

Les prochains rendez-vous de l’Odyssée pour notre santé : Surice-Philippeville dans une ferme Nature & Progrès (01/10), Charleroi (02/10), Mons (03/10) ! Toutes les informations détaillées sur cette Odyssée et chaque étape du tour ainsi que les organisations partenaires se trouvent dans le dossier de presse

Lutte contre les pesticides : du 27 septembre au 3 octobre, à Bruxelles et partout Wallonie une Odyssée à vélo pour notre santé.

© Nature & Progrès, tous droits réservés

18 septembre 2025

Communiqué de presse

Initiée par des mutuelles de santé, auxquelles se sont joints d’autres acteurs de la société, « l’Odyssée pour notre santé » vise à faire émerger en Europe un nouveau chapitre de la santé publique en promouvant un cap agricole sans pesticides. Sous la forme d’une caravane de cyclistes avec des agriculteurs victimes ; elle prendra le départ à Bruxelles et parcourra toute la Wallonie du 27 septembre au 3 octobre prochain. Son objectif : conscientiser sur les menaces des pesticides sur la santé et faire bouger les lignes pour une agriculture saine et robuste.

Un nouveau cap agricole s’impose : une agriculture affranchie des pesticides, pour notre santé et celle des écosystèmes. Cette volonté  s’inspire des victoires obtenues sur le danger que représentait – et représente toujours – l’exposition à l’amiante. Malgré les études scientifiques et les méta-analyses[1] démontrant les liens entre « exposition aux polluants chimiques, dont les pesticides et maladies » et « alimentation biologique et bienfaits pour la santé », les pesticides continuent d’être autorisés et utilisés massivement par les agriculteurs.rices en Europe, comme l’a été l’amiante, pendant des décennies. 

Pour Martin Rieussec-Fournier, président des Mutuelles pour la santé planétaire, à l’origine de ce mouvement, il est urgent d’agir «Il a fallu un siècle pour faire interdire l’amiante, alors que la dangerosité était connue depuis 1906 et que des innocents en mourraient. L’amiante cause toujours plus de 90 000 morts par an en Europe. On ne peut pas accepter qu’il en soit de même avec les pesticides, qui rendent les gens de plus en plus malades, et de plus en plus jeunes. De surcroît, notre système de santé publique ne tiendra pas le coup.» 

Cette Odyssée à travers l’Europe s’étendra sur trois années. Elle commence par Bruxelles, siège des institutions européennes où se décident les fondements des normes en matière de pesticides et l’avenir de la Politique agricole commune. La caravane de cyclistes, bien visible grâce à des carottes géantes, sillonnera, une semaine durant, les routes de Wallonie pour rejoindre les différentes étapes du tour : Braives (28/09), Liège (29/09), Namur-Gembloux (30/09), Surice-Philippeville (01/10), Charleroi (02/10), Mons (03/10).

A chaque étape, différentes activités sont organisées par les acteurs locaux, avec comme ambition de sensibiliser les populations aux dangers des  pesticides et de faire connaître les bénéfices de l’agriculture biologique pour la santé. 

Au programme (variable selon les étapes) : goûter et spectacle de clowns, fanfare, témoignages de victimes de pesticides, buffets et tables partagées bio évidemment, mais aussi des tables rondes et conférences avec des agriculteurs, des spécialistes et des responsables politiques[2].

Pour les mutualités belges particulièrement impliquées dans cette Odyssée, comme Solidaris et la Mutualité chrétienne, la prise en compte de ce lien « santé-pesticides » en vue d’un changement systémique de modèle agricole et alimentaire robuste, durable et sain s’impose. 

« À la Mutualité chrétienne, nous défendons une agriculture qui protège les citoyens, les agriculteurs et notre environnement. C’est tout le sens de notre engagement dans l’odyssée pour notre santé. Réduire l’usage des pesticides, c’est prévenir les maladies, préserver la biodiversité et garantir à chacun un accès équitable à une alimentation saine.» déclare Elise Derroitte, vice-présidente de la MC. 

Aux revendications européennes globales de l’Odyssée pour notre santé, des acteurs belges ont formulé une série de demandes propres à la Wallonie et à la Belgique visant à ancrer ce changement de cap. 

Toutes les informations détaillées sur cette Odyssée et chaque étape du tour ainsi que les organisations partenaires se trouvent dans le dossier de presse

[1] Voyez entre autres, l’INRAE, et l’INSERM.

[2] Entre autres, la ministre AC. Dalcq et le Ministre Y. Coppieters en débat à Gembloux le 30 septembre, la  députée Céline Tellier en table ronde à Surice le 01 octobre,…

Les pesticides PFAS bientôt interdits ? En Belgique, les ambitions diffèrent selon les niveaux de pouvoir.

© Adobe Stock, tous droits réservés

17 septembre 2025

Communiqué de presse

Ce 16 septembre, des auditions étaient organisées à la commission Climat de la Chambre des représentants sur une proposition de loi d’interdiction pure et simple de mise sur le marché des pesticides PFAS en Belgique.[1] En Wallonie, les partis de la majorité avancent avec une timide motion d’interdiction d’utilisation des pesticides PFAS qui ne concernerait que les particuliers et pas les utilisateurs professionnels. La société civile réitère sa demande de stopper en amont toute pollution des eaux et de notre alimentation aux pesticides PFAS.

Les pesticides PFAS ont pénétré nos campagnes depuis le début du XXIᵉ siècle. Reconnus pour leurs propriétés hydrophobes et lipophobes (répulsives aux graisses), ils bénéficient d’une stabilité renforcée, gravissant les échelons dans l’arsenal des intrants chimiques à disposition du monde agricole. Rien qu’en 2022, les ventes avaient augmenté de 20% en Belgique, avec une croissance maintenue en 2023.[2]

Vu leur formule chimique similaire, ces herbicides, fongicides et insecticides PFAS se transformeraient tous en TFA (acide trifluoroacétique), un PFAS à chaine courte extrêmement mobile et persistant qui contamine la qualité chimique nos ressources en eaux dans des proportions inquiétantes [3] et de façon quasi irréversible. Quant aux effets de ces pesticides PFAS et de leur métabolite commun, le TFA, sur la santé, ils restent mal connus, car trop peu investigués jusqu’à présent. Cependant, les études existantes suggèrent des risques similaires à ceux des PFAS à chaîne longue, notamment d’être reprotoxique pour l’être humain (lésions hépatiques, malformations, …). [4]

Au niveau fédéral – compétent en matière de mise sur le marché des produits – Une proposition de loi visant à interdire la mise sur le marché de ces pesticides PFAS en Belgique avait été déposée sous l’ancienne législature. L’actuelle Commission Climat du Parlement fédéral l’a ressortie des tiroirs pour la mettre en discussion. En vue d’éclairer les parlementaires sur les tenants et aboutissant des pesticides PFAS, elle a sollicité l’avis de différentes institutions et organisations : syndicats agricoles, services publics, acteurs de la société civile, chercheurs … Les auditions de ce 16 septembre[5] et avis écrits ont permis de rendre compte de l’ambition de la proposition de loi sur la table, de l’ampleur des enjeux, de certains blocages aussi. Cette proposition vise tous les produits phytopharmaceutiques PFAS (biocides et pesticides), tous les composants (substance active et co-formulant) et tous les utilisateurs, professionnels ou particuliers. À la suite de ces auditions, la proposition sera à l’ordre du jour des débats de la Commission Climat le 23 septembre prochain.

 

 

Dans le même temps, au niveau régional – compétent en matière d’utilisation des produits pesticides pour protéger l’environnement et la santé – en Wallonie, à la faveur d’un cycle d’auditions sur les pesticides organisé au Parlement cet été, les partis de la majorité (MR-Engagés) annoncent une motion pour interdire l’utilisation des pesticides PFAS mais qui ne concernerait que les particuliers et pas les agriculteurs. Un projet d’arrêté, en cours d’élaboration au niveau du cabinet de l’environnement, disposerait de la même limitation, ce qui est largement insuffisant par rapport à la hauteur des enjeux. [6]

« L’utilisation des pesticides PFAS en dehors des professionnels de l’agriculture est tout à fait anecdotique.  On parle de 4 substances actives, dont trois sont à peine commercialisées en Belgique, et la quatrième, particulièrement utilisées par les agriculteurs. En 2025, avec tout ce qu’on connait des risques des pesticides PFAS pour l’environnement et la santé, se limiter à interdire l’utilisation des pesticides PFAS pour les seuls particuliers, tout en laissant les agriculteurs libres de continuer à les utiliser, c’est créer l’illusion d’agir, tout en faisant du sur place. » s’insurge Virginie Pissoort, Responsable Plaidoyer chez Nature et Progrès.

[1] https://www.lachambre.be/flwb/pdf/56/0079/56K0079001.pdf

[2] Vente de pesticides PFAS en Belgique : L’administration révèle des chiffres en nette augmentation. – Nature & Progrès

[3] Monitoring TFA – 2eme rapport – Avril 2025_V2.pdf

[4] German agencies classify TFA as toxic substance | Umweltbundesamt

[5] https://media.lachambre.be/archives?dateFrom=2025-09-16&dateTo=2025-09-16

[6] Le Parlement de Wallonie, à 2h38’.

Pesticides : le Parlement Wallon donne la parole aux experts

© Adobe Stock, tous droits réservés

24 juin 2025

Communiqué de presse

Ce 24 juin marque le début d’un marathon d’auditions au Parlement de Wallonie sur la question des pesticides. Cette initiative fait suite aux déclarations de la ministre de l’Agriculture, Anne-Catherine Dalcq, en avril dernier. Ses propos, jugés comme minimisant les risques liés aux pesticides, ont suscité de vives réactions, notamment dans la communauté scientifique.[1] En réponse, les commissions parlementaires ont décidé d’organiser une série d’auditions. En tout, une vingtaine d’experts et de parties prenantes seront entendus entre ce 24 juin et le 10 juillet.

L’organisation de ces auditions n’a pas été sans incident, et à juste titre. Initialement proposées en Commission Santé et Environnement, leur élargissement à une commission conjointe avec les parlementaires de la Commission Agriculture s’est rapidement imposé comme une évidence. Chaque groupe politique a pu suggérer des intervenants. Au vu des agendas chargés et de la multiplicité des experts, il a été décidé d’entendre certains experts en commission conjointe, d’autres en commission santé et environnement.

Concrètement, certains intervenants – principalement les experts sur les dimensions environnementale et de santé publique des pesticides ne seront écoutés et entendus « que » par les parlementaires de la commission Santé-Environnement, alors que les autres – dont les représentants des syndicats agricoles, et certaines institutions – seront eux écoutés en Commission conjointe.

Un cloisonnement que regrettent les membres de l’opposition et de la société civile, vu la transversalité de la problématique et la prégnance du problème, il est fondamental que les parlementaires de la Commission Agriculture s’imprègnent des impacts des pesticides pour la santé, l’environnement et la société en général. Dans un courrier aux présidents de partis du 6 juin, nous écrivions :

« Nous sommes convaincus que pour réussir à atteindre l’objectif de réduction de 50% des pesticides en Wallonie, la vision en silo qui a majoritairement prévalu sur ces enjeux par le passé doit faire place à une véritable démarche de regards croisés et d’approche globale. » [2]

Ce matin, les parlementaires de l’opposition sont revenus sur l’incohérence de disjoindre ces auditions et ont insisté pour que les rapports d’audition soient conjoints.

Il est toutefois à souligner que la ministre de l’Agriculture Anne-Catherine Dalcq était présente dès le début des auditions, en Commission Santé et Environnement, pour écouter, aux côtés du ministre Yves Coppieters, tous les experts : la cellule Environnement de la Société scientifique de médecine générale (SSMG), Bruno Schiffers docteur en agronomie, Grégoire Wieërs de l’unité d’enseignement « One health » de l’université de Namur, et un représentant de la cellule CPES du SPW – ARNE.

Aux exposés détaillés et fouillés des 4 intervenants qui ont tiré la sonnette d’alarme sur les risques et les dangers qu’il est impossible de résumer iciont succédé des salves de questions et échanges jusqu’en début d’après-midi, démontrant l’intérêt pour toutes les présentations développées, complémentaires les unes des autres. En termes de conclusion des présentations, on notera des nuances. Là où la SSMG et le professeur Schiffers se rencontrent fermes sur la nécessité d’agir à la source, et de stopper la contamination dès à présent ; les deux intervenants suivants étaient moins pressants, soulignant la nécessité des monitorings, biomonitorings, des collecte de données, d’analyse’évaluations des pratiques, etc. 

« Ce premier cycle d’auditions a donné un éclairage clair et détaillé sur les effets déjà là, observés et documentés des pesticides pour la santé et l’environnement. On ne peut qu’espérer que, les parlementaires et les deux ministres présents, mieux informés des risques réels des pesticides prendront leur responsabilité en matière d’utilisation des pesticides, à l’avenir. » conclut Virginie Pissoort de Nature et Progrès, après avoir assisté à cette matinée d’auditions.

Prochaines auditions : 25 juin, 7, 8 et 10 juillet. Toutes sont et seront disponibles en ligne sur le site du Parlement.[3] Et, après ? la balle sera dans le camp de nos responsables politiques qui n’auront plus aucune excuse pour ne pas agir. Les citoyens ont l’occasion de rejoindre l’appel des professionnel.le.s de la santé et scientifiques en faisant entendre leur voix via notre appel[4].

[1] Pesticides : Professionnel.le.s de la santé et scientifiques, signez notre réponse à la ministre wallonne de l’Agriculture, Mme Dalcq. – Docteur Coquelicot

[2] https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2025/06/250606_AuditionsPW_Demande-de-commission-conjointe.pdf

[3] Le Parlement de Wallonie

[4] https://www.natpro.be/actus/pesticides/citoyen%c2%b7nes-rejoignez-les-profesionnel-le-s-de-la-sante-et-scientifiques-et-faites-entendre-votre-voix/

Citoyen·nes, rejoignez les professionnel.le.s de la santé et scientifiques et faites entendre votre voix !

© Adobe Stock, tous droits réservés

Nous aurons l’occasion de la porter lors des auditions parlementaires prévues ces 24/06 et 8/07, pour que les citoyen.nes et en particulier, les enfants, les agricultrices et agriculteurs ainsi que les riverains, soient protégés des pesticides.

Rejoignez-nous et signez notre appel ci-dessous !

Nous ne pouvons accepter que la santé soit sacrifiée sur l’autel de la prospérité de l’industrie agro-alimentaire et chimique.

Nous, société civile, rejoignons l’appel lancé par les professionnel·les de la santé et les scientifiques pour interpeller la ministre wallonne de l’Agriculture, Mme Dalcq, ainsi que le gouvernement, afin de protéger celles et ceux qui sont en première ligne face aux pesticides : les enfants, les agricultrices et agriculteurs ainsi que les riverains, et in fine, nous toutes et tous.

Ce n’est pas un débat technique réservé aux spécialistes ou aux lobbies. Ce qui est en jeu, c’est notre droit fondamental à vivre dans un environnement sain.

Nous rejoignons l’appel des professionnels de la santé sur les points suivants[1] :

Tout d’abord, assimiler un pesticide à « une molécule trouvée dans la nature que l’on a modifiée un peu pour mieux cibler son action », comme l’affirme la ministre, est au mieux l’indice d’une sérieuse méconnaissance de ces produits (car la majorité des pesticides sont à ce jour des molécules de synthèse), au pire, l’indice de la volonté de nier la dangerosité pourtant avérée de certaines de ces molécules. Dans les deux cas, cela est hautement problématique, et incompatible avec le devoir d’exemplarité d’une ministre de l’Agriculture.

Mais encore, il est inexact de dire que « tous les paramètres de santé sont contrôlés par des toxicologues ». En effet, le système actuel comporte de nombreuses lacunes, notamment au niveau des essais qui se basent sur des modèles simplifiés ne pouvant rendre compte de la complexité des systèmes naturels. La preuve en est, qu’après quelques années d’utilisation en conditions réelles, des effets indésirables sont observés sur la santé et/ou sur l’environnement, aboutissant à un retrait des autorisations délivrées (l’exemple du retrait récent du Flufénacet est démonstratif). Ces interdictions ou retraits n’empêchant d’ailleurs pas leurs effets néfastes de perdurer. Il en va ainsi de dizaines de pesticides ou de leurs produits de dégradation, toxiques et rémanents dans l’environnement, comme le DDT et autres organochlorés interdits depuis des années voire des décennies, que l’on retrouve sous forme de résidus dans nos aliments, nos eaux souterraines et finalement comme contaminants dans notre sang. Demain ce sera le cas des dérivés des pesticides PFAS.

La ministre semble ignorer les tenants et aboutissants de la procédure d’autorisation des produits phytopharmaceutiques (les « pesticides »), ce qui est inquiétant.

(…) la partie la plus problématique de l’enjeu des pesticides concerne notre santé, celui-ci devrait – c’est le bon sens même – être discuté avec scientifiques et médecins, mais il semble que la ministre préfère en discuter avec les entreprises phytopharmaceutiques et les producteurs de semences tout en continuant d’ignorer, comme ses prédécesseurs, les effets délétères massifs des pesticides sur la santé et la biodiversité.

Pourtant les données scientifiques ne cessent de s’accumuler et de renforcer le faisceau de preuves. Paradoxalement, les résultats des études commanditées par la Région Wallonne elle-même ces dernières années restent ignorés, les experts scientifiques inaudibles et les recommandations émises non suivies d’effet. Pour preuve l’AGW sur l’emploi des pesticides qui n’a pas été révisé suite aux études menées par l’ISSeP, le CRA-W et l’ULiège.

Nous sommes toutes et tous contaminés par les pesticides, y compris pendant des périodes de vie de haute vulnérabilité à leur toxicité. Femmes enceintes, bébés, enfants, adolescents. Personne n’y échappe. Les études de biomonitoring montrent que dans notre pays, les pesticides sont d’ailleurs parmi les polluants les plus retrouvés chez les enfants.

En Belgique, plus de 5.000 tonnes de substances actives pesticides sont épandues chaque année. Une grande part des substances autorisées en Belgique sont cancérigènes, toxiques pour la reproduction, toxiques pour les organes, irritantes pour la peau. De nombreuses substances actives ont des effets de perturbation endocrinienne. Une trentaine sont des PFAS. Sans oublier toutes les autres substances ajoutées à la molécule active, les co-formulants, dont plusieurs sont des biocides (métaux lourds, arsenic, hydrocarbures…).

L’impact des pesticides sur le déclin de la biodiversité et sur la santé humaine est considérable. Ce ne sont pas des opinions. Ce sont des faits scientifiques.

Nous ne pouvons accepter que la santé soit la variable d’ajustement des systèmes alimentaires industriels. Nous ne pouvons accepter que la santé soit la grande oubliée des discussions et des décisions prises en matière d’agriculture. Aujourd’hui, les externalités négatives du complexe agro-industriel sont assumées par la société, par nous toutes et tous. Les coûts en termes d’impact sur la santé sont colossaux. L’épidémie de maladies chroniques (cancers, maladies neurodégénératives…), outre toutes les souffrances qu’elle occasionne, ne fait qu’appauvrir la collectivité. Nous ne pouvons accepter que la santé soit sacrifiée sur l’autel de la prospérité de l’industrie agro-alimentaire et chimique.

 

Nous ajoutons :

L’évaluation des risques qui précède la mise sur le marché des pesticides n’est pas complètement maitrisée par les toxicologues et elle est tout à fait INSUFFISANTE :

  • l’étude de la toxicité à long terme n’est pas requise
  • les effets cumulatifs ne sont pas évalués
  • les co-formulants passent sous le radar
  • l’effet sur les bébés est mesurée en fixant son poids de référence à 9kg l’adolescent à 60 kg
  • les études épidémiologiques sont sous estimées ; seules les bonnes pratiques de laboratoire produites par l’industrie sont prises en compte et elles sont souvent illisibles pour les évaluateurs …
  • les métabolites – produits de dégradation des substances actives des pesticides – ne sont pris en compte que s’ils ont été jugés pertinents
  • la perturbation endocrinienne doit être évaluée depuis 2018 mais des dizaines de pesticides qui sont à l’étude sur ce critère continuent à être provisoirement autorisés en attendant les résultats de ces études …

Dans ces conditions, il est impossible d’affirmer qu’un pesticide autorisé est sans risque.

Il suffit d’un détour par la France pour comprendre la gravité du problème : certaines maladies comme certains cancers ou la maladie de Parkinson sont désormais reconnues comme maladies professionnelles chez les agriculteurs exposés aux pesticides.

Les pesticides ne sont pas une fatalité.

Les alternatives aux pesticides existent ; nos agriculteurs bio le prouvent tous les jours, depuis des décennies parfois! Chez Nature & Progrès, nous le démontrons à travers différentes actions et outils : venez à la rencontre de notre réseau de producteurs bio et locaux, à la découverte de la campagne Vers une Wallonie Sans Pesticides qui documente sur et avec les acteurs de terrain les pratiques alternatives aux pesticides culture par culture, regarder notre film-documentaire intensif ces agriculteurs alliés de la terre qui suit 3 parcours bio inspirant le temps d’une saison en grandes cultures bio, etc.

Aujourd’hui, nous ne pouvons plus rester silencieux. Alors que des auditions auront lieu les 24 juin et 8 juillet, nous voulons que la voix des citoyen·nes compte, aux côtés de celle des médecins, des chercheurs, des soignants.

Il faut du courage et de l’accompagnement des acteurs pour changer nos modèles de production, mais c’est nécessaire pour notre santé et celle de la terre !

 

[1] Pesticides : Professionnel.le.s de la santé et scientifiques, signez notre réponse à la ministre wallonne de l’Agriculture, Mme Dalcq. – Docteur Coquelicot

Le Ministre Frank Vandenbroucke est appelé à ne pas transiger sur ses responsabilités en matière de pesticides !

© Adobe Stock, tous droits réservés

21 mai 2025

Communiqué de presse

Des organisations dont des mutuelles de santé et de la  société civile comme Nature & Progrès, demandent au ministre de la santé Franck Vandenbroucke de faire entendre sa voix dans les décisions sur l’autorisation des pesticides, comme il en a la prérogative. Il s’agit d’un rôle qu’il a jusqu’ici abandonné.

Les pesticides ont un impact majeur sur la santé des citoyens et des agriculteurs. Des études scientifiques le confirment tous les jours, le doute n’est plus permis.  L’exposition provient principalement de l’alimentation, mais également des dérives de pesticides auprès des riverains, de la pollution de nos eaux, etc … Des liens ont été établis entre l’exposition aux pesticides et différents cancers (particulièrement lymphome non hodgkinien, myélome multiple, mélanome cutané, cancer des ovaires, du sein et de la prostate), les maladies respiratoires, les troubles neurodégénératifs (maladie de Parkinson), les troubles du développement et de la cognition, les troubles cardiovasculaires, l’infertilité et les malformations congénitales, l’intoxication aiguë, les troubles immunitaires ou les dommages causés au microbiome.

L’arrêté royal du 28 février 1994 relatif au stockage, à la mise sur le marché et à l’utilisation des pesticides à usage agricole prévoit que le ministre de la Santé dispose d’un droit de codécision en matière de pesticides. [1] Il s’agit précisément de veiller à ce que la réglementation européenne – qui place la protection de la santé humaine et de l’environnement au cœur de ses priorités, y compris dans le cadre de la production alimentaire – soit appliquée de manière cohérente et responsable. Ce droit de codécision a fait l’objet d’une transaction lors de la précédente législature, à la suite d’un protocole d’accord conclu entre les ministres de la Santé et de l’Agriculture.[2] Or, ces deux ministres sont toujours en fonction avec les mêmes attributions : la société civile s’oppose à ce qu’un tel protocole soit à nouveau signé par les ministres.

Aussi, la société civile belge, inquiète, se mobilise pour que le ministre Frank Vandenbroucke assume enfin pleinement et entièrement ses responsabilités en la matière au cours de cette législature et qu’il protège sa population.

Un précédent courrier d’organisations environnementales et de protection de la nature du 6 février 2025 est à ce jour resté sans réponse officielle. Une déclaration est publiée ce 21 mai 2025.[3]

 “ La question des pesticides dépasse de loin les pratiques agricoles et la protection des cultures. Les preuves scientifiques de leur toxicité pour notre santé, et celle des agriculteurs eux-mêmes, abondent. Ce n’est pas pour rien que depuis 1994, il est prévu que le ministre de la Santé dispose d’un pouvoir de co-décision en matière d’autorisation de mise sur le marché de ces produits. Cette compétence a été abandonnée lors de la précédente législature mais le ministre Vandenbroucke doit prendre ses responsabilités et exercer son pouvoir de co-décision en la matière. De surcroît, c’est tout à fait en phase avec la vision “One health” si chère à la Belgique.” note Virginie Pissoort de Nature & Progrès

[1] Arrêté royal du 28 février 1994 relatif à la conservation, à la mise sur le marché et à l’utilisation des pesticides à usage agricole, article 8.

[2] Protocole entre le ministre des Affaires Sociales et de la Santé Publique et le Ministre des Classes Moyennes, des Indépendants, des PME et de l’Agriculture du 20 octobre 2020

[3]  https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2025/05/Les-organisations-de-sante-et-environnementales-demandent-au-ministre-Vandenbroucke-de-faire-entendre-sa-voix-dans-les-decisions-sur-les-pesticides.pdf

Vente de pesticides PFAS en Belgique : L’administration révèle des chiffres en nette augmentation.

© Adobe Stock, tous droits réservés

20 mars 2025

Communiqué de presse

La semaine pour « les Alternatives aux Pesticides », du 20 au 30 mars, nous rappelle pourtant que les pesticides ne sont pas une fatalité.

Pour les 31 substances actives PFAS commercialisées en Belgique, les années 2022 et 2023 affichent une augmentation globale des ventes de plus de 20 % par rapport à 2021.[1] Malgré un consensus sur l’objectif de réduction de l’usage des pesticides chimiques et l’existence d’alternatives, particulièrement mises en avant à l’occasion de la Semaine pour « les Alternatives aux pesticides » du 20 au 30 mars, l’usage de pesticides PFAS, persistants pour notre environnement et risqués pour notre santé, continue de se répandre.

Initiée en France en 2006, la Semaine pour les Alternatives aux Pesticides a lieu chaque année du 20 au 30 mars.[2]. Ces dates sont symboliques, car elles correspondent aux dix premiers jours du printemps, marquant le retour des oiseaux et du beau temps, mais aussi celui des épandages dans les champs. En Belgique aussi, cette période est une occasion de montrer et de démontrer que les pesticides ne sont pas une fatalité et qu’il est possible de s’en passer. Nature & Progrès et ses membres – agriculteurs et agricultrices, consommateurs et consommatrices – l’ont bien compris et s’emploient depuis des décennies à prouver la réalité et la faisabilité d’une agriculture sans pesticides de synthèse, notamment à travers : le projet « Vers une Wallonie sans pesticides »[3], le film « intensif, ces agriculteurs, alliés de la terre »[4], le podcast « Les éclaireurs invisibles »[5], etc.

Mais les freins à l’essor de ces alternatives sont nombreux et, in fine, davantage politiques ou réglementaires que véritablement techniques ou agronomiques. Parmi les principaux obstacles figure l’autorisation et la commercialisation des produits phytopharmaceutiques (PPP). Parmi ces PPP, les pesticides PFAS ont pénétré le marché depuis le début du XXIᵉ siècle. Présentant des propriétés hydrophobes (hydrofuges) et lipophobes (répulsives aux graisses), ces herbicides, insecticides et fongicides bénéficient d’une stabilité renforcée, ce qui leur a permis de gravir les échelons dans l’arsenal des intrants chimiques à disposition du monde agricole.

Alors que, dans notre première étude exploratoire sur les pesticides PFAS en 2023, intitulée « Récolte toxique »[6], nous relevions une augmentation de 20 % des ventes de pesticides PFAS en une dizaine d’années, avec plus de 220 tonnes de substances actives vendues en 2021, les chiffres récemment révélés par l’administration pour les années 2022 et 2023 font état de plus de 270 tonnes en 2022. Cela représente une hausse de plus de 22 % en une seule année, tendance qui s’est maintenue en 2023.

« Depuis 15 ans, la Belgique met en place des plans de réduction de l’utilisation des pesticides (NAPAN, PWRP, etc.)[7]. Malgré cela, les ventes des produits les plus persistants dans l’environnement continuent d’augmenter. C’est aberrant ! La Belgique doit faire preuve de plus d’ambition et placer en priorité la protection de la santé et de l’environnement !»  souligne Virginie Pissoort, responsable plaidoyer chez Nature & Progrès.

La grande majorité des pesticides PFAS (c’est-à-dire les pesticides contenant au moins un atome de carbone entièrement fluoré), et probablement tous, se décomposeraient en TFA (acide trifluoroacétique). Les taux de contamination de notre environnement par le TFA, en particulier ceux de nos eaux, ne cessent d’augmenter. Cette situation est d’autant plus préoccupante qu’à ce jour, il n’existe aucune certitude quant à son élimination.[8] Au mieux, le TFA présent dans l’eau pourrait être neutralisé par osmose inverse, un procédé extrêmement coûteux, rendant sa généralisation peu envisageable.

Quant aux effets des pesticides PFAS et de leur métabolite commun, le TFA, sur la santé[9], ils restent mal connus et ont fait l’objet de trop peu d’investigations jusqu’à présent. Cependant, les études existantes suggèrent des risques similaires à ceux des PFAS à chaîne longue, notamment des perturbations endocriniennes, une reprotoxicité, des lésions hépatiques ou encore des maladies thyroïdiennes. D’ailleurs, les pesticides PFAS les plus commercialisés sont classés parmi les Candidats à la Substitution, une catégorie regroupant des pesticides reconnus pour leur haute toxicité.

Nature & Progrès ne peut que dénoncer la hausse continue de l’utilisation des pesticides PFAS. Il est donc urgent de stopper en amont leur vente et leur utilisation, et de mettre enfin les alternatives aux pesticides de synthèse au premier plan.

« La plupart des agriculteurs sont pris dans un entonnoir, un système de dépendance aux intrants chimiques en amont et de circuits de commercialisation qui leur échappent en aval. Les pouvoirs publics doivent encourager les pratiques agricoles sans produits chimiques, développer les filières, garantir un marché et mettre les agriculteurs en confiance afin qu’ils puissent s’affranchir des pesticides. Il en va de notre santé, de la leur, et de notre environnement aussi. » conclut Virginie Pissoort, responsable de plaidoyer pour Nature & Progrès

[1] Données de vente | Phytoweb

[2] Semaine pour les alternatives aux pesticides – Du 20 au 30 mars 2025

[3] Wallonie sans pesticides – Nature & Progrès

[4] Intensifs, ces agriculteurs alliés de la terre : un documentaire à voir en exclusivité sur Auvio – Auvio

[5] Podcast – Nature & Progrès

[6] recolte-toxique-pfas-etude.pdf

[7] NAPAN, Nationale Actie Plan Action National Nationaal Actie Plan d’Action National (NAPAN) | Phytoweb, PWRP, Programme wallon de réduction des pesticides, Programme Wallon de Réduction des Pesticides | Région Wallonne

[8] Nature & Progrès réagit aux nouvelles informations sur la présence du TFA dans l’eau potable en Wallonie – Nature & Progrès

[9] https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2025/01/3.-SSMG-Impacts_PesticidesPFAS_Sante.pdf

L’Europe vote enfin l’interdiction d’un pesticide PFAS : le Flufenacet sur la touche. Un pas dans la bonne direction.

© Adobe Stock, tous droits réservés

13 mars 2025

Communiqué de presse

Ces 11 et 12 mars, les Etats membres de l’Union européenne se sont réunis et ont voté l’interdiction du Flufénacet, un pesticide PFAS, largement utilisé depuis 2004 en Belgique et en Europe qui se dégrade en acide trifluoroacétique (TFA) et qui a récemment été reconnu comme « perturbateur endocrinien ». Les Etats membres ont pris leur responsabilité en décidant l’interdiction de cette substance. L’interdiction du flutolanil, également sur la table, n’a malheureusement pas recueilli la même majorité.

Parce que c’est un perturbateur endocrinien reconnu comme tel par l’EFSA depuis l’été 2024, et qu’il se dégrade en acide trifluoroacétique (TFA) dans des proportions inquiétantes pour la préservation de nos ressources en eau, l’herbicide flufénacet vient d’être interdit en Europe. Ce vote des Etats membres[1] , attendu déjà en décembre 2024, mais postposé pour des raisons de formalité administrative, est une décision dont on peut se réjouir.

« C’est une belle victoire pour la protection de la santé et de l’environnement, nos ressources en eau en particulier.  Nous savons que la Belgique a soutenu cette interdiction et nous nous en félicitons même s’il eut été difficilement admissible d’en décider autrement. Le caractère de « perturbateur endocrinien est ce qu’on appelle un critère cut-off, qui ne laisse aucune latitude ou marge d’appréciation. C’est un signal aussi et nous l’espérons un premier domino qui tombe … » déclare Virginie Pissoort, responsable plaidoyer chez Nature & Progrès.

Il est reconnu que les PFAS à chaîne longue sont des perturbateurs endocriniens.  . Leur toxicité est, au mieux, modérée.[2] Aucune étude ne permettait de croire que les PFAS à chaîne courte (-CF3), qui constituent les 33 autres substances actives pesticides PFAS encore approuvées en Europe, y échappent. L’étude du caractère de « perturbation endocrinienne » des pesticides n’est à proprement parler obligatoire dans le cadre de la réglementation européenne sur les produits phytopharmaceutiques, que depuis 2018. Plusieurs substances actives sont à ce jour à l’étude et cela peut prendre des années. Pour le flufenacet, il est aujourd’hui avéré que c’est un perturbateur endocrinien. Demain très probablement également de nouvelles analyses aboutiront aux mêmes conclusions pour les autres pesticides PFAS pulvérisés sur nos champs et nos aliments.

Par ailleurs, la dégradation des pesticides PFAS en acide trifluoroacétique est une autre raison de mettre fin à ces substances. Les taux de contamination des eaux sont extrêmement préoccupants. Les rapports de PAN Europe et de ses membres, dont Nature et Progrès en 2024, l’ont révélé.[3]

Le fultolanil, un fongicide, largement utilisé en pommes de terre était également sur la table des Etats membres à cette réunion, précisément pour sa dégradation reconnue en acide trifluoroacétique. Malheureusement, l’interdiction proposée par la Commission n’a pas reçu l’adhésion des Etats Membres. La position de la Belgique sur ce dossier ne nous a pas été révélée.

D’ores et déjà, la sortie du flufénacet n’est pas sans importance pour l’agriculture et les agriculteurs. En Belgique, pas moins de 78.000 kilos de flufénacet étaient encore été commercialisé en 2023 (dernière donnée connue) et ce chiffre représente une hausse de 20% en une dizaine d’années. En France, Bayer aurait déjà annoncé de nouveaux herbicides, à base entre autres de dilfufenican, un autre herbicide PFAS.[4] Ceci n’est pas la solution, et démontre bien que l’approche substance par substance dans le cadre de la réglementation sur les pesticides est insatisfaisante à protéger notre santé et notre environnement.

« Face à la créativité et les innovations de l’industrie, Nature & Progrès préconise une interdiction généralisée de tous les pesticides PFAS, parce qu’ils sont toxiques pour notre environnement et plus que probablement pour notre santé, ces substances doivent être interdites dans les meilleurs délais. En juillet dernier, une proposition de loi interdisant la mise sur les marché et l’exportation des pesticides PFAS avait été déposée à la Chambre.[5] Nous ne pouvons que soutenir cette proposition, aujourd’hui dans les tiroirs. »

L’agriculture belge doit se tourner vers des solutions alternatives qui protègent réellement et durablement l’environnement, la santé et les agriculteurs. L’agriculture sans polluants chimiques doit devenir une priorité dans le cadre de toutes les politiques publiques concernées. Les alternatives aux pesticides chimiques de synthèse existent, nos agriculteurs bio le prouvent tous les jours.[6]

 

[1] cdf19932-5774-4925-a901-4d1134bf6f07_en

[2] Mokra, K. (2021), Endocrine disruptor potential of short-and longchain perfluoroalkyl substances (PFASs). A synthesis of current knowledge with proposal of molecular mechanism. International Journal of Molecular Sciences, 22(4), 2148.

[3] PFAS – Nature & Progrès

[4] Un nouvel herbicide céréales pour l’automne 2026

[5] La Chambre des représentants de Belgique

[6] https://www.natpro.be/wallonie-sans-pesticides/

Pesticides à Bruxelles : des organisations se mobilisent aux côtés de la Région Bruxelles Capitale

© Adobe Stock, tous droits réservés

17 décembre 2024

Communiqué de presse

Pour protéger la santé et l’environnement des Bruxellois·es, Nature et Progrès, PAN-Europe, We Are Nature Brussels et la Société royale apicole de Bruxelles et environs (SRABE) ont décidé de se mettre aux côtés de la Région de Bruxelles-Capitale, attaquée par Belplant pour avoir adopté un arrêté visant à mieux encadrer l’utilisation des pesticides.

Suite à l’Ordonnance du 20 juin 2013, les pesticides chimiques étaient déjà interdits dans la Région de Bruxelles-Capitale (RBC) dans certaines zones fréquentées par le grand public (espaces publics, crèches, écoles, maisons de repos, zones Natura 2000, etc.). Le 6 juin dernier, le gouvernement de la RBC a adopté, en troisième lecture, un arrêté plus ambitieux qui étend l’interdiction de principe à tout le territoire de la RBC, y compris aux jardins et parcs privés ainsi qu’aux surfaces agricoles consacrées à la production végétale, étant entendu qu’une période transitoire de six ans est octroyée pour ces dernières.

L’association Belplant, qui représente Bayer, Syngenta et d’autres producteurs de pesticides, a intenté un recours en annulation contre cet arrêté devant le Conseil d’État. Pour la RBC et les quatre organisations qui se sont portées parties intervenantes volontaires dans un recours déposé ce lundi 16 décembre, ce recours est non fondé et contraire au droit européen.

 » Il existe une directive sur l’utilisation durable des pesticides, la Directive SUD. Celle-ci impose des obligations   concrètes, dans le chef des Etats membres pour protéger l’environnement et les citoyens de la contamination des  pesticides, dont les risques ne sont plus à démontrer. La RBC a adopté un arrêté ambitieux visant à implémenter cette Directive sur le territoire hétérogène et spécifique que constitue la RBC. Mais force est de constater que cela dérange l’industrie. » précise Virginie Pissoort, responsable de plaidoyer chez Nature et Progrès et auteure du recours.

La spécificité de la région bruxelloise, densément peuplée mais également composée de superficies agricoles et de nombreux espaces verts est une réalité qui n’a pas échappé à l’association « We Are Nature. Bruxelles », également partie intervenante dans cette procédure. 

 » L’usage répété des pesticides mortifie les sols, qui deviennent imperméables aux eaux de pluie, augmentant ainsi le risque d’inondation à Bruxelles. Les pesticides empêchent également les sols de jouer leur rôle de puits de carbone et de régulateurs de la température dans une ville déjà saturée par la bétonisation. Les terrains non construits doivent absolument être maintenus comme tels et rester des sols vivants. Ils sont nécessaires pour la biodiversité, pour notre santé, et pour nous adapter aux effets du changement climatique » soutient Jean Baptiste Godinot, président de l’association « We Are Nature Brussels.

Les obligations en matière de restriction de l’utilisation des pesticides et de réduction des risques liés aux pesticides, imposées par la Directive SUD ne sont que très faiblement mises en œuvre par les Etats membres. Nonobstant les plans de réduction des pesticides, leur commercialisation ne diminue pas réellement et des pesticides dangereux et toxiques sont encore présents sur le marché. La RBC dont la route vers le « Zéro pesticide » avait été amorcée en 2013 fait figure d’exemple dans la Directive SUD. 

Pour Martin Dermine, directeur de PAN Europe:  « L’utilisation de pesticides génère des nuages de produits chimiques qui voyagent parfois sur de longues distances. Les Bruxellois peuvent s’enorgueillir que leur région soit la première au sein de l’Union européenne à respecter une directive vieille de 15 ans, en prévenant sa population de l’exposition aux pesticides et en protégeant son environnement ». 

La RBC a déjà déposé son mémoire en réponse à la requête en annulation de Belplant, mais pour les organisations intervenantes, l’intérêt de l’acte attaqué est tel qu’elles demandent au Conseil d’État d’être parties prenantes à la cause, aux côtés de la RBC.

Pour Christine Baetens, administratrice de la Société Royale Apicole de Bruxelles et Environs (SRABE),   » il a été clairement démontré que les pesticides sont extrêmement toxiques pour les abeilles et les autres pollinisateurs. Ils modifient leur comportement et affectent leur capacité de reproduction. Or, les abeille sont les véritables chevilles ouvrières de l’agriculture, grâce à leur rôle de pollinisateur. Une initiative comme celle de la RBC de restreindre l’utilisation des pesticides les plus toxiques est une nécessité. « 

Il appartiendra au Conseil d’État de se prononcer sur l’intérêt des quatre associations à intervenir dans ce contentieux et de juger de la recevabilité de leur requête.

Pour le reste, la procédure en annulation suivra son cours habituel : échanges d’écrits, avis de l’Auditeur, audience, etc. Un arrêt du Conseil d’État sur le bien-fondé de la requête en annulation n’est pas attendu avant l’été 2026. D’ici là, les pesticides autres que ceux à faible risque seront interdits, sauf dérogation, et une période de transition spécifique sera prévue pour les agriculteurs, que la RBC entend accompagner dans cette transition.

Un tournant dans l’histoire des pesticides PFAS : flufénacet, flutolanil ; aujourd’hui autorisés, demain interdits ?

© Adobe Stock, tous droits réservés

3 décembre 2024

Communiqué de presse

Ces 4 et 5 décembre, les Etats membres de l’Union européenne décideront du sort du flufénacet, un pesticide PFAS, largement utilisé depuis 2004, qui se dégrade en acide trifluoroacétique (TFA). Classé récemment comme « perturbateur endocrinien » et présentant un risque élevé de contamination des eaux à l’acide trifluoroacétique (TFA), la Commission européenne (CE) prend ses responsabilités et propose le non-renouvellement de cet herbicide dont les ventes ont atteint 63 000 kilos rien qu’en 2021 en Belgique. Cette dernière a indiqué qu’elle suivra la CE. Le flutolanil, fongicide utilisé notamment pour les pommes de terre et également émetteur de TFA, devrait connaitre la même destinée.

La pollution des eaux de surface et des eaux potables, y compris les eaux minérales, par le TFA est dénoncée par PAN Europe et ses membres, dont Nature et Progrès, depuis plusieurs mois.[1] En Wallonie, les analyses de la Société wallonne des eaux (SWDE) faisant suite à ces rapports montrent des concentrations moyennes de TFA allant de 500 à 1 500 nanogrammes/litre. En Flandre, les niveaux sont encore plus préoccupants : selon les données récentes de la VRT, certaines eaux potables atteignent jusqu’à 9 000 nanogrammes/litre. [2]

Le TFA, un métabolite extrêmement persistant des PFAS, serait principalement issu des pesticides PFAS dans les zones rurales, selon plusieurs études scientifiques[3] et l’Agence allemande pour l’environnement (UBA). Actuellement, 37 substances actives PFAS sont autorisées en Europe, dont le flufénacet et le flutolanil sur l’avenir desquels les Etats membres devront se prononcer demain. Toutes ces substances se décomposeraient en ce métabolite dénommé TFA. À ce jour, seule l’osmose inverse permet de neutraliser le TFA. Alors que les sociétés de distribution d’eau potable risquent de devoir faire face à des investissements exorbitants, in fine à la charge du contribuable, pour maintenir les taux de TFA en dessous des seuils acceptables ; les entreprises d’eau minérale, elles, ne disposent d’aucune alternative pour faire baisser le niveau de TFA dans leur eau.

Or, elles ne sont pas épargnées. A ce titre, la concentration impressionnante de TFA dans les eaux de Villers, révélée aujourd’hui par PAN-Europe, [4] à proximité de zones agricoles a de quoi interpeller. Les agriculteurs et les producteurs d’eau minérale subissent finalement les conséquences de l’industrie à la source de ces polluants. Les autorités qui  ont, jusqu’ici, autorisé la dissémination, en négligeant entre autres, de se soucier de ce métabolite ont la responsabilité de légiférer urgemment.  

Mais cela pourrait évoluer. D’éminents scientifiques tirent la sonnette d’alarme sur la menace de l’accumulation irréversible de TFA dans l’environnement. Ils soulignent la nécessité de « mesures contraignantes » pour réduire les émissions de TFA [5]. Récemment, l’Allemagne, pour donner suite à une étude produite par Bayer révélant le caractère reprotoxique du TFA, a demandé de classifier le TFA comme Reprotoxique de catégorie 1B, conformément au Règlement EC n°1273/2008 [6], faisant du TFA un « métabolite pertinent », écrit la CE dans sa proposition de non-renouvellement du flufénacet. Une telle classification pourrait être lourde de répercussion pour l’avenir de tous les pesticides PFAS.

Pour Salomé Roynel, responsable politique chez PAN Europe : « L’interdiction proposée par la CE d’interdire les deux pesticides PFAS que sont le flufénacet et le flutolanil est légalement requise.» PAN appelle tous les États membres à « suivre la loi et la science, en donnant la priorité à la protection de la santé humaine et de l’environnement et à adopter rapidement ces interdictions. »

De source sûre, la Belgique a confirmé qu’elle soutiendrait la position de la CE sur le non-renouvellement du flufénacet[7], dont le caractère de « perturbateur endocrinien » et « les risques de contamination des eaux souterraines au TFA sont élevés ». Il devrait en être de même du flutolanil, même si, dans ce cas, c’est l’absence d’étude finalisée sur les risques pour le consommateur liés à la présence de TFA dans les cultures agricoles qui est invoquée à la source de la proposition de non-renouvellement. [8]

Pour Virginie Pissoort, responsable de plaidoyer : « Dès lors que la CE propose un non-renouvellement de la substance, nous n’en attendions pas moins de la part de la Belgique. La Commission semble enfin prendre le TFA en main, ce qui constitue une étape majeure dans la bataille contre les pesticides PFAS. Mais même si le flufénacet était interdit demain, après avoir été autorisé pendant 20 ans, ce revirement démontre bien que les règles d’autorisation des pesticides ne sont pas fiables. Ce n’est pas parce qu’un pesticide est aujourd’hui légalement mis sur le marché qu’on peut en conclure qu’il n’est pas nocif ou toxique. »

Toutes les analyses de résidus de pesticides, qu’elles soient effectuées dans l’air, [9] dans les chambres à coucher [10]  ou sur les personnes elles-mêmes[11] révèlent la présence de pesticides autrefois autorisés et maintenant interdits : ainsi, l’imidaclopride, le malathion ou l’atrazine, continuent de contaminer nos environnements, même après leur interdiction. 

« Il est temps que la Belgique mette toute son énergie à encourager des modes de production agricole qui se passent de polluants chimiques et qui cochent toutes les cases des défis de notre société : santé publique, biodiversité, eau, environnement, lutte contre les changements climatiques, emploi en milieu rural, etc. », conclut Julie Van Damme, secrétaire générale de Nature et Progrès.

Une agriculture sans polluants chimiques doit devenir une priorité pour protéger notre santé et celle de la Terre.

[1] PFAS – Nature & Progrès

[2] Kleinste soort PFAS duikt op in Vlaams drinkwater: « Lozingen door industrie en pesticiden moeten teruggedrongen worden » | VRT NWS: nieuws

[3] Pesticides can be a substantial source of trifluoroacetate (TFA) to water resources

[4] PAN Europe

[5]  The Global Threat from the Irreversible Accumulation of Trifluoroacetic Acid (TFA), Hans Peter Arp et al, Octobre 30, 2024

[7] EU Commission proposal to ban Flufenacet

[8] Review report on Flutolanil

[9] EXPOPESTEN – ISSeP

[10] Onderzoek in slaapkamers vindt cocktail van 21 pesticiden, Tytgat ziet “geen risico’s voor gezondheid” | VILT vzw

[11] BMH-Wal – ISSeP

Nature & Progrès réagit aux nouvelles informations sur la présence du TFA dans l’eau potable en Wallonie

© Adobe Stock, tous droits réservés

17 octobre 2024

Communiqué de presse

Nature & Progrès exprime sa profonde préoccupation face aux chiffres révélés[1] et à la communication sur la présence généralisée d’acide trifluoroacétique (TFA) dans l’eau potable en Wallonie, un métabolite des pesticides PFAS. La détection de cette molécule persistante dans des concentrations importantes des eaux de distribution confirme les données de notre étude exploratoire « TFA, un polluant éternel dans l’eau que nous buvons »[2]. Elle soulève de graves questions quant à la sécurité de notre eau et la gestion des « polluants éternels » comme les PFAS.

Le TFA, un sous-produit des pesticides PFAS et des gaz fluorés, est particulièrement problématique en raison de sa persistance extrême et de sa capacité à se déplacer facilement dans l’environnement. La première source de ce TFA en région rurale, comme à Philippeville où les plus hautes concentrations ont été trouvées, proviendrait des pesticides PFAS. Vingt-huit substances actives sont à l’origine de cette pollution et se retrouvent dans plus de 200 produits commercialisés en Belgique : herbicides, fongicides, insecticides, tout y passe. Bien que la toxicité du TFA soit encore mal connue, certaines études révèlent déjà des effets potentiels sur le foie et le système immunitaire, similaires à ceux observés avec d’autres PFAS à chaîne longue. Contrairement à ce que certains chiffres officiels pourraient laisser croire, la probabilité que le TFA soit toxique pour les mammifères ne doit pas être sous-estimée : l’Allemagne a d’ailleurs demandé à l’échelle européenne de classer le TFA comme reprotoxique, à la suite d’une étude communiquée par Bayer révélant des malformations sur les fœtus de lapins exposés au TFA.

L’été dernier, suite aux études publiées par Nature et Progrès et PAN Europe sur la présence de TFA dans les eaux, la région wallonne avait mandaté la SWDE pour réaliser un monitoring exhaustif sur la présence de TFA dans l’eau potable. Les résultats révélés par le ministre wallon de l’Environnement, Yves Coppieters, indiquent des concentrations atteignant jusqu’à 3100 ng/L à Philippeville, bien au-delà de la valeur guide de 2200 ng/L proposée par le conseil scientifique indépendant, sur la base de l’institut néerlandais pour la santé publique et l’environnement, RIVM. Bien que cette valeur ne remette pas immédiatement en cause la potabilité de l’eau, elle souligne la nécessité d’un suivi rigoureux, mais surtout de mesures correctives urgentes, pour stopper la pollution en amont.

« Ces niveaux de TFA dans l’eau sont d’autant plus inquiétants que l’utilisation des polluants à l’origine du TFA est en augmentation, comme l’a révélé notre étude « Récolte toxique[3] ». C’est particulièrement le cas des pesticides PFAS dont les ventes ont augmenté ces dernières années, pour atteindre 220 tonnes en 2021. Les niveaux actuels de pollution de nos eaux au TFA sont donc appelés à encore augmenter à l’avenir, si rien n’est entrepris pour faire cesser les sources de contamination. ». Virginie Pissoort, responsable de plaidoyer, Nature & Progrès.

Face à la difficulté de traiter le TFA par les méthodes classiques comme les filtres à charbon actif, seule l’osmose inverse permet à ce jour de stocker ce polluant, une solution qui reste coûteuse et difficilement généralisable. Nous refusons que les coûts de cette dépollution soient répercutés sur les consommateurs. Conformément au principe du « pollueur-payeur », les industries responsables de la mise sur le marché de ces substances doivent prendre leurs responsabilités et contribuer au financement des mesures correctives.

Au vu de l’ampleur de la contamination, nous demandons une action immédiate des autorités publiques. Conformément à la Déclaration de politique régionale (DPR), où le ministre Yves Coppieters se veut ambitieux en termes de lutte contre les PFAS, nous l’enjoignons, au titre de ses compétences et du respect du principe de précaution, à interdire le plus rapidement possible l’utilisation de tous les pesticides PFAS, générateurs de TFA (flufénacet, diflufénican, fluopicolide, etc.) ainsi que les gaz fluorés. Au niveau fédéral, nous demandons une révision et une interdiction de toutes les autorisations de ces produits. La santé de nos concitoyens et la préservation de nos ressources en eau en dépendent.

En parallèle, nous appelons à un accompagnement des agriculteurs pour les aider à se détourner de ces produits dangereux et à adopter des pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement.

[1]http://environnement.wallonie.be/cgi/dgrne/plateforme_dgrne/news/visiteur/displaynews.cfm?idnews=695&langue=FR

[2] https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2024/07/tfa-juillet-2024-v4.pdf

[3] https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2024/03/recolte-toxique-pfas-etude.pdf