Les beaux moulins de Wallonie, ce n’est pas juste une part de notre patrimoine de vieilles pierres. Qu’ils soient à vent ou à eau, ces nobles édifices continuent à jouer un rôle capital dans la production de notre pain. Car, du bon grain au bon pain, le rôle du meunier est, plus que jamais, essentiel. Et la mouture artisanale sur pierre reste inégalable, alors que la mouture industrielle sur cylindres tend à se généraliser… Commençons notre tour de ces moulins ancestraux en rendant visite, à Moulbaix, à Joseph Dhaenens et Toine, son petit-fils…
« Le moulin a été remis en état en 1941, explique Joseph Dhaenens, par mon grand-père et un de ses sept fils, mon père Josef Dhaenens, exempté de service militaire pour raison de soutien de famille. Le moulin avait été abandonné pendant l’entre-deux guerres, comme la plupart des moulins de village, remplacés par les meuneries industrielles au début du XXe siècle. Mais, dès 1941, le travail reprit pour pallier aux restrictions alimentaires et de transport qui furent imposées. Avant de remettre le moulin en activité, mon grand-père avait installé l’électricité pour que le moulin puisse travailler avec un moteur électrique en cas de période sans vent. Puis, à partir de 1945, la guerre terminée, les petits moulins produisirent de l’alimentation pour le bétail et un peu de farines. Les grandes meuneries reprirent le marché de la farine parce qu’avec nos pierres, nous ne pouvions pas produire la farine blanche. Les réglements de l’envahisseur nous avaient imposé de moudre à 85% et les gens avaient alors très envie de manger du pain blanc. Nous avons donc repris la mouture pour le bétail, même si mon père a continué à faire de la farine… Puis, à la fin des années soixante et au début des années septante, sont apparus les premiers fermiers bio qui souhaitèrent faire moudre leurs grains sur des meules en pierre. Ce fut le début d’une nouvelle demande par adeptes du bio. Après le décès de mon père, en 1982, nous n’avons plus fait que de la farine naturelle, et de plus en plus de bio. »
Jürg Schuppisser et Christine Piron – revue 118 – page 42