Les chantiers participatifs ne sont pas un truc de bobos…


Mais à quelles conditions ?

Lors d’un colloque rassemblant les acteurs professionnels de l’éducation permanente, à Namur en novembre 2012, il fut brièvement question, lors d’un atelier, des enjeux écologiques liés à l’habitat et de la sensibilisation des citoyens à ce sujet. À l’interrogation d’un participant concerné par cette thématique, la réponse d’un membre de l’auditoire a fusé, ferme et définitive, balayant le sujet d’un revers de la main. En substance, le verdict, apparemment accepté par une salle demeurée silencieuse, fut : « l’habitat écologique, c’est un truc de bobos qui peuvent se le permettre ». Comprenez : ça n’a rien à voir avec l’éducation populaire…

Cette sentence, maintes fois entendue dans des versions plus ou moins hostiles, ne cesse de me trotter dans la tête. Primo, parce que notre association, Nature & Progrès, a fait de l’habitat et de l’énergie l’intitulé de l’une de ses thématiques d’action à part entière. Secundo, parce que tout cliché renferme une part irréductible de vérité, soit au premier degré sur ce dont on parle – ce qui est dit est au minimum partiellement correct -, soit de façon indirecte, sur le lieu d’où l’on parle, sur la relation entre ce qui est énoncé et celui qui énonce. En l’occurrence, les deux cas me semblent vrais : le cliché mérite certainement d’être pris au sérieux, et le lieu d’où l’on parle, à savoir le champ de l’éducation permanente, peut être interrogé lui aussi. En tout état de cause, il m’était impossible de m’en tenir à ce niveau d’analyse, celui du cliché, qui, tout vrai qu’il puisse être, demeure un prêt-à-penser dénué du recul critique tant prôné par les acteurs de l’éducation permanente. Cette affaire ne pouvait rester impensée. Cette analyse se veut donc être une première contribution à l’ouverture d’un champ de recherche encore largement inexploré : les apports mutuels – parfois conflictuels – entre l’ancrage historique de l’éducation populaire et l’émergence du défi écologique de notre époque. Les formes d’engagement générées par ce dernier, notamment parmi des publics considérés comme « privilégiés » – et qui n’hésitent pas à se considérer eux-mêmes comme tels -, se situent-elles forcément hors du champ de l’éducation permanente ? Autrement dit, les nouvelles pratiques liées aux enjeux écologiques sont-elles réductibles aux publics qui s’en saisissent spontanément, hic et nunc ? Si non, à quelles conditions ? Si oui, et dans tous les cas, comment penser la question écologique sur une base plus large ?