La rumeur est insistante : nos gestionnaires de réseau de distribution (GRD) installeraient de nouveaux compteurs électriques réputés « intelligents » chez les particuliers ! Le consommateur lambda peut-il vraiment s’y opposer ? En a-t-il réellement le droit, ou n’est-ce toujours qu’une simple promesse faite par nos politiciens et qui volera en éclats dès que l’installateur garanti IA (intelligence artificielle) sonnera à la porte ? A vrai dire, une fois de plus, rien n’est clair…

Par Dominique Parizel

 

Rappelons d’abord que tout ceci est de compétence régionale et est donc abordé très différemment en Wallonie et à Bruxelles. Précisons aussi que cette question concernera, à termes, l’ensemble des compteurs présents dans nos habitations – électricité, gaz, eau -, voire peut-être tout ce qui comptabilise – régule ? – les consommations dans les logements collectifs. Ces « modernisations » s’inscrivent dans le cadre de la Directive européenne 2018/2002, du 11 décembre 2018, dont il est très difficile pour le citoyen normalement intelligent de savoir si elle est déjà transposée – et surtout comment ? – dans les législations régionales…

 

Face aux géants des communications, que peut le simple citoyen ?

Disons-le tout net : ceci s’inscrit surtout dans le cadre du déploiement de la 5G, c’est-à-dire l’ »Internet de demain« , la connectivité ultra-invasive et ultra-rapide qu’aucun responsable politique ne semble aujourd’hui prêt à remettre en question. Au point que rien ne transpire, ou presque, des modalités de mise en œuvre des nouvelles infrastructures qui nous sont imposées, sans que nous n’ayons jamais rien demandé. Bonne ou mauvaise, la 5G ? A chacun son avis… Le droit élémentaire du citoyen, en tout cas, on s’en fout sans le moindre état d’âme ! Une nouvelle forme d’intelligence ? Bonjour, la transparence…

Or donc, le remplacement des vieux compteurs électromécaniques que nous connaissons depuis belle lurette semble avoir déjà commencé, même si pas mal de zones floues subsistent quant au cadre légal de cette vaste opération. Personne aujourd’hui ne semble, en tout cas, vouloir expliquer comment la Directive européenne est, ou pas, ou pas encore, transposée. On nous expliqua pourtant naguère – mais avec quelles garanties d’ordre légal ? – que la Déclaration de Politique Régionale Wallonne, du 9 septembre 2019, prévoyait d’accorder à chaque Wallon.ne le droit de refuser le placement, chez lui, chez elle, d’un compteur communicant, intelligent. Il semblerait cependant que nos GRD procèdent déjà à des remplacements de compteurs, diffusant – mais dans quel but ? – des messages incorrects à la population au sujet de législations qui n’existeraient peut-être même pas encore, se montrant même insistants ou, le cas échéant, menaçants, selon ce qui fut rapporté à Stop Compteurs Communicantswww.stopcompteurscommunicants.be/… La plus élémentaire « mise au courant » (!) du consommateur à propos de ses droits exacts en la matière serait, en tout état de cause, largement insuffisante… A Bruxelles, les choses sont plus catégoriques encore : un recours a été déposé contre l’ordonnance du 17 mars 2022 qui stipule que « nul ne peut refuser l’installation ou le maintien d’un compteur intelligent ni en demander la suppression« … On est à Bruxelles, à Téhéran ou bien à Pékin ?

Les GRD wallons, quant à eux, ne disposant évidemment plus de vieux compteurs électromécaniques – « faut bien vivre avec son temps, mon bon monsieur… » -, tiendraient la promesse gouvernementale, en cas de refus de particulier, en plaçant… ce dont ils disposent, c’est-à-dire des nouveaux compteurs « intelligents » mais désactivés, ou disons plutôt pas encore activés. Pour combien de temps ? Ces compteurs ne transfèreraient ainsi ni données, ni opérations à distance, mais émettraient malgré tout un signal, ce qui est très problématique pour les personnes électrosensibles. Témoignerait de cette émission le fait que de tels compteurs, branchés sur le réseau 4G, disposeraient – nous n’en avons jamais vu, d’où le conditionnel d’usage ! – de deux diodes, l’une indiquant que le compteur est dûment enregistré, l’autre l’intensité du signal émis. La possibilité de tout couper – et de garantir, par conséquent, l’effectivité d’un refus ainsi que le prévoit, sinon la loi, au moins la promesse gouvernementale – existe-t-elle donc vraiment ? Rien n’est moins sûr, semble-t-il. A Bruxelles, Sibelga est très clair : même coupé, le compteur continue d’émettre ! D’où les recours en justice introduits par Stop 5Ghttps://stop5g.be/fr/index.php.

 

Un problème ? Où ça, un problème ?

Les problèmes – nombreux ! – que soulève l’installation de compteurs communicants dans nos foyers furent longuement exposés dans une précédente analyse intitulée « Avons-nous besoin des compteurs « intelligents » pour réaliser une transition énergétique efficace ? » C’était en 2019, avant la Covid ! Pointons évidemment le respect élémentaire que nous devons témoigner à l’égard des personnes électrosensibles, à l’heure où la Wallonie s’enorgueillit d’éliminer, l’une après l’autre, l’ensemble des « zones blanches » du numérique. La question des pannes, ainsi que celle du coût élevé d’un matériel très sophistiqué – qui les prendra en charge ? -, semblent également sérieuses, alors que nos vieux compteurs électromécaniques fonctionnaient paisiblement et sans frais depuis plus d’un demi-siècle… Enfin, la grave question de ces « inconnus dans la maison », qui y laissent des portes numériquement entrouvertes, doit également être posée, à l’heure où les piratages informatiques de tous ordres foisonnent. Des réponses sérieuses doivent impérativement être apportées…

D’une manière plus large encore, nul n’ignore que la généralisation – espérée ou redoutée – de la 5G inquiète. La question de sa dangerosité intrinsèque n’est pas élucidée mais, plus encore, c’est l’ensemble des applications superflues qu’elle va permettre – et qui seront, pour la plupart, inutiles et très énergivores – qui interpelle en ces temps d’indispensable sobriété énergétique. Table-t-on, par exemple, sur la généralisation de la 5G et de son réseau de compteurs interconnectés – et donc réputés « intelligents » ! – pour écrêter les pics de consommation électrique ? Notre parc automobile est appelé à s’électrifier, à l’échéance 2035, mais rien n’est fait ni même prévu, semble-t-il, pour renforcer le réseau électrique. Cherche-t-on déjà à réguler les consommations de courant – en ce compris les recharges des batteries de véhicules – à l’aide de ces nouveaux compteurs communicants, en tarifant éventuellement la consommation « en temps réel » et non selon des profils, certes très approximatifs de consommation moyenne, comme c’est le cas actuellement ? Espère-t-on éviter ainsi les surcharges de réseau, et les risques de black-out, en menaçant le citoyen de payer très cher toute consommation imprévue ou intempestive ? Et de quoi seront faits les énigmatiques algorithmes qui décideront du droit de chacun au courant disponible ?

 

Où un minimum d’infos ne nuirait pas…

Nous dire si la transposition – ou pas ? – de la Directive européenne existe bel et bien permettrait déjà à l’humble quidam que nous sommes d’y voir un peu plus clair. Il existerait, paraît-il, une liberté laissée, dans la Directive européenne, aux Etats membres d’émettre ou de ne pas émettre… Pas besoin d’émettre en permanence, en effet, s’il s’agit juste de relever annuellement un compteur ! Une simple possibilité d’impulsion donnée à l’agent constateur suffirait, lorsqu’il passe à proximité… Faut-il craindre, au contraire, avec des interactions permanentes, qu’un Big Brother énergétique s’installe vraiment parmi nous ? Beaucoup de questions, beaucoup trop, et aucune réponse, alors qu’il semble que le « grand remplacement » ait déjà commencé, en Wallonie du moins. Et alors même que le Wallon aurait, paraît-il, un droit de refus… Mais de refuser quoi exactement, et selon quelles modalités ? Droit réel ou simple promesse ? Difficile à dire… Et on se fera encore gronder comme des garnements peu obéissants quand on parlera de défiance du citoyen à l’égard du politique…