Le groupe local de Namur de Nature & Progrès compte parmi les plus anciens. Sa composition a cependant été récemment renouvelée et ses nouveaux membres ont tenu à prendre eux-mêmes la plume afin de dresser l’état des lieux de leur action. Excellente initiative ! Ecoutons donc attentivement tout ce qu’ils ont à nous dire…

Par David Sokol et Michel Berhin

La « locale » namuroise de Nature & Progrès, recrée et relancée en 2016, est un doux mélange d’anciens et de nouveaux… Quelques membres le sont depuis quelques années, voire de très longues années – presque quarante ans pour notre doyenne fraichement pensionnée, trésorière de la locale mais également organisatrice de voyage « bio » en France et d’ateliers sur la lactofermentation et les soins par l’argile – et d’autres ont rejoint le joli groupe, depuis trois ans et demi… Cette particularité est intéressante car elle permet de mixer nos différents profils, nos générations, et nos dynamiques et attentes respectives. Parmi certains des projets mis en place par notre locale, nous citons entre autres, le cycle « Les dessous du vin : du label au terroir » et un autre cycle intitulé initialement « Effondrement ?!…, Exerçons notre pouvoir d’agir ici et maintenant ! »
Mais peut-être avant tout, vous expliquer notre mode de fonctionnement… Dans notre locale, il n’y a ni président, ni secrétaire. Nous travaillons en réflexions collectives et en partage des tâches, encadrés par Valérie, notre animatrice. Il n’y a pas de règles pour la récurrence/fréquence de nos réunions. Ce sont nos projets qui définissent le rythme et la fréquence de nos rencontres. Certes, la « crise » a ralenti – oui, encore… – la concrétisation de certaines activités, abîmé la motivation de certains, laissé émerger les difficultés à traverser l’époque actuelle pour d’autres… Mais nous ne nous sommes pas laissés abattre. Ah non !

Visio ma non troppo

Durant cette période covid, malgré une bonne série de réunions en vidéoconférence dès que cela fut possible, nous nous rassemblions et, depuis un moment nous nous rassemblons, en chair et en os, pour la grande majorité de nos réunions, de nos échanges. Pour notre plus grand plaisir, aussi. En effet, rien ne remplacera jamais des moments partagés ensemble plutôt que des face à face par le truchement des écrans. Bien entendu, les moyens modernes nous permettent souvent de gagner en rapidité et en efficacité, mais il est bon également de rappeler ici qu’ils nous éloignent parfois de l’essence profonde des rapports humains, sociaux.
Au fil du temps, bien que ne nous voyant quasiment qu’autour de projets menés au sein de la locale, une forme d’amitié se développe et cela, avec beaucoup de simplicité et d’authenticité. La moyenne d’âge de l’équipe de la locale ayant légèrement baissé, ces dernières années, force est tout de même de constater que cela reste un challenge de convier et de convaincre de plus jeunes membres à venir nous rejoindre. Et pourtant, réside bien là l’une des possibilités de dynamique vertueuse et nourrissante d’une locale : mixer les générations qui la constituent. La vie d’un groupe étant très organique, nous sommes persuadés que les projets menés ces dernières années permettront à de jeunes recrues d’approcher et de rejoindre, pour un bout de chemin, l’équipe de notre belle locale de Namur.

Revenons-en aux projets !

– Divine boisson

L’un d’entre eux, fut le cycle intitulé « Les dessous du vin : du label au terroir ». Ce cycle a été initié en 2019 et réalisé en 2020 par la locale de Bruxelles, avec le support d’un membre de la locale de Namur. Plutôt sympa de voir deux locales collaborer ! Ravie du succès de ce cycle en région Bruxelloise, la locale de Namur se l’est également approprié. Elle l’a réalisé sur son territoire namurois en 2021. Et cela malgré la crise covid, en présentiel, tout en respectant et en jonglant avec les consignes dictées au moment de la réalisation de ces projets. Cela n’aurait pas eu lieu sans l’enthousiasme et le dynamisme de la coordinatrice de ces deux locales. Merci à Valérie d’avoir permis ces échanges, rencontres, collaborations…
Ce cycle offrait, en quatre rencontres, la possibilité au public de mieux s’y retrouver et d’identifier les enjeux interpellant autour de cette question du « bon vin ». En effet, le cheminement du cycle nous mène à des réflexions globales et systémiques sur les méthodes culturales, modes de production et de transformation, les différents labels et types d’appellations, la lecture et la compréhension des étiquettes… Autant d’aspects qui souvent pourraient faire tourner la tête des consommateurs, bien plus – tout autant ? – que l’effet du nectar lui-même ! Entre projections, échanges sur nos représentations, rencontres, discussions et débats avec des acteurs viticoles de cette filière… Il faut avouer que ce cycle permet de faire généreusement tout le tour du sujet « vin ». S’il est vrai que l’histoire de la vigne se confond avec celle de l’humanité, force est de constater que ce cycle était bien utile pour éclaircir la vision du public sur ce qu’est le vin, et ce qu’il est devenu aujourd’hui. L’envie de travailler et de réfléchir sur ce sujet fut la lecture « coup de poing », par certain-es de nos bénévoles, du livre de G.-E. Séralini : Le goût des pesticides dans le vin.

– Collapse

Le deuxième cycle qui nous a rassemblés était intitulé : « Effondrement !?… Notre pouvoir d’agir ici et maintenant ! » Cette idée de cycle autour de la collapsologie – la théorie de l’effondrement global et systémique de la civilisation thermo-industrielle, considéré comme inéluctable à plus ou moins brève échéance, et des alternatives qui pourraient lui succéder, n’oublions surtout pas cette seconde partie – a émergé lors d’une réunion de la locale, il y a environs trois ans. Il aura fallu ruser pour réussir à concrétiser une partie des activités imaginées pendant la crise sanitaire. La Covid ne nous a, en effet, pas permis d’organiser l’entièreté des activités en présentiel. Certaines ont donc eu lieu… virtuellement, à distance. Si cette option en ligne ne convient pas nécessairement à tout le monde, force est de constater que nous aurons tout de même réussi le challenge d’accueillir un public d’âges très variés. Car oui, les contraintes qui était celles de l’époque nous ont obligé à jongler avec certaines activités parfois obligatoirement en ligne, parfois en présentiel, afin de respecter le plus possible les règles imposées par nos dirigeants du Codeco. Malgré cela, quel bonheur de constater que la bonne humeur et la bienveillance furent toujours au rendez-vous et ce, malgré les sujets potentiellement anxiogènes que représentent les questions soulevées par ce cycle. Oui, on va probablement dans le mur ! Comment, dès lors, atténuer la marche globale, voire sortir du rang pour faire émerger un autre monde…

De l’éco-anxiété à la résilience

Après une série d’activités d’échanges sur le constat de la situation actuelle de notre planète et de ses limites, des différentes formes d’effondrements déjà en cours et en prévision – à venir -, mais aussi sur notre manière de vivre et d’appréhender tout ceci au point de vue émotionnel… Il était ensuite temps de réfléchir à des actions concrètes et des leviers permettant – même modestement – d’agir pour bâtir un avenir le plus désirable possible. Parmi les nombreuses idées à déconstruire, il y a celle des écogestes. En effet, beaucoup d’êtres humains estiment qu’ils sont parfois illusoires et quasiment inutiles, vu leur modestie, face à l’ampleur de la situation et des dégâts que nous avons causés et que nous causons sur notre environnement.
Il fut donc heureux de constater que chaque geste compte, que tout changement d’habitude, aussi insignifiant qu’il puisse paraître à l’origine, peut permettre de réels changements chez nous et dans notre entourage. Le seuil de basculement d’une attitude serait à situer autour des 25%. Nous sommes des expérimentateurs, des passeurs et des éveilleurs… Du comportement individuel passons au collectif…

Besoin de récits mobilisateurs

Bien sûr, la charge émotionnelle et le désarroi que l’on peut ressentir en prenant profondément la mesure de la situation, en prenant conscience de la situation et de la dégradation du vivant – une phase compliquée à vivre… – semblent inévitables. L’anxiété et le malaise qui peuvent s’installer, consciemment ou parfois inconsciemment, ne sont pas à prendre à la légère. Toutes et tous, nous vivons ces moments à notre manière, et à notre rythme. Avec un peu de recul, il nous semble essentiel de pouvoir échanger avec notre entourage autour de ces questions parfois lourdes qui nous remuent parfois violemment à l’intérieur de nous. La part émotionnelle est donc à prendre généreusement en considération.
Ensuite, selon nous et aussi selon certains scientifiques et penseurs dont les écrits et les paroles nourrissent et ont inspiré ce cycle, vient le moment de l’action. L’action oui, mais de préférence pas n’importe comment et pas uniquement de manière individuelle. Car certes, si chaque geste que nous posons personnellement à un impact, il est certain que les solutions d’avenir résident dans le collectif, dans une autre manière d’être et de « faire ensemble ». Se mettre en projet ensemble, échanger sur nos expériences, oser concrétiser des idées novatrices et qui bouleversent les schémas de fonctionnement habituel… Ces différentes expériences vécues permettent de faire émerger des récits positifs, des exemples dont on parle, et qui permettent parfois d’inspirer, de (ré)-émerveiller, de faire appel à notre créativité pour participer à la construction ce « monde d’après », bien plus inspirant qu’un hypothétique et non souhaitable « retour à la normale »…

Résilience alimenterre

Actuellement, toujours encadré-es et soutenu-es activement par Valérie, nous sommes en train de travailler sur une suite à ce projet… « La résilience alimenterre » fera l’objet de nos prochaines réunions et programmation d’activités. Nos méthodes allient réflexions et actions, outils didactiques variés – projection de documentaire, rencontres d’acteurs de terrain sur site, world café… Parfois autour d’un bon vin – bio, bien sûr, et avec modération ! -, d’un bon pain au levain et de bons fromages de nos producteurs locaux. Déjà plein d’idées et d’envies en tête…