Les trois entreprises que nous vous présentons aujourd’hui sont des partenaires de Nature & Progrès depuis un bon moment déjà. Elles appuient et inspirent concrètement notre action, et nous les en remercions. Nous avons donc cherché, en conversant avec quelques-uns de leurs dirigeants, à nous forger une image plus juste de leur responsabilité sociétale et environnementale. Au-delà du cliché « entrepreneurial » – qui rime un peu trop fort avec « seigneurial » -, nous avons voulu questionner et observer en quoi ces communautés, plus ou moins étendues, d’individus évoluent par la force des circonstances et se transforment à présent en véritables entreprises citoyennes.
Qu’entendons-nous par-là ? Le fait évident, tout simplement, que l’entreprise, au même titre que chacun d’entre nous, joue un rôle déterminant face aux diverses crises que nous affrontons, qu’elle est un acteur important de la transition écologique. Mais comment cela se traduit-il pour elle, au jour le jour, voilà ce que nous avons tenté d’apercevoir… Plus encore que les séries d’actes, à caractère souvent symbolique, posés au nom de ces différentes « maisons », de ces différentes marques, nous sont apparus de nouveaux modes d’organisation qui, dans un souci primordial de bien-être au travail, régissent aujourd’hui leur obligation d’efficience. Car le monde de l’entreprise, nul ne peut l’ignorer, est avant tout soumis aux réalités implacables de l’économie.
Pourtant, leur « capital humain » – plus que leur capital tout court – apparaît désormais comme leur meilleur atout pour traverser les tempêtes annoncées. Les « patrons » que nous allons vous présenter le savent mieux qui quiconque et c’est donc sur lui qu’ils investissent aujourd’hui, avec une bienveillance qui pourra surprendre. Plus les nouvelles générations y pénètrent, plus les entreprises sont scrutées quant à la réalité de leurs valeurs et de leurs engagements. Au premier rang desquels figurent évidemment le climat et l’environnement. Mais pas seulement : les questions de gouvernance et les questions de genre sont là également, avec force, au tout premier plan… Le rapport de l’entreprise à sa propre autonomie et à ses propres limites sont également des notions qui semblent de plus en plus incontournables.
Alors ? L’entreprise de demain sera-t-elle écologique et citoyenne ? Parions qu’elle le sera…

Par Dominique Parizel et Benoît Lespagnard

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Asdaex – www.asdaex.com
Intégrateur de logiciels spécialisé en automation, informatique industrielle et hospitalière, ainsi qu’en analytique

« Il n’y a pas de Planète B, affirme d’emblée Francis Martin, un des quatre fondateurs d’Asdaex. Nous sommes une société de services, une société de personnes où les employés passent le plus clair de leur temps derrière des ordinateurs. Nous servons principalement le secteur des sciences de la vie – pharmaceutique, biotechnologies, medtech et hôpitaux – et nous constatons que la préoccupation environnementale est de plus en plus clairement exprimée chez eux. Très fortement parmi les nouvelles générations, bien sûr, mais la prise de conscience a aussi gagné les générations plus anciennes. Et c’est très bien comme cela… Deux choses doivent évidemment être distinguées, en ce qui nous concerne : nos convictions, d’une part, et l’ensemble des opportunités que nous pouvons saisir pour les rencontrer mais aussi, d’autre part, la dimension strictement égoïste qui concerne la valeur intrinsèque de l’entreprise et celle des gens qui la composent. La problématique environnementale fait, de plus en plus, partie de nos valeurs propres, sous la pression surtout de nos plus jeunes collaborateurs mais aussi d’une prise de conscience généralisée. Fort heureusement, l’action voulue par ceux et celles qui composent Asdaex rencontre très bien la nécessité économique. Et la collaboration avec des associations telles que Nature & Progrès est une excellente opportunité pour nous, de telles organisations apparaissant, à l’égard des entreprises, comme Jiminy Cricket sur l’épaule de Pinocchio. Elles les rappellent aux dures nécessités environnementales. »

Au service de la planète

« Comment les spécificités du métier d’Asdaex peuvent-elles être mises au service de la planète ? Pour donner un peu de contexte, explique Francis Martin, prenez l’exemple des cryptomonnaies – comme le bitcoin par exemple – qui sont de véritables catastrophes environnementales car la puissance de calcul qu’elles requièrent est toujours plus élevée afin d’empêcher qu’elles puissent être « hackées ». Ces monnaies sont donc extrêmement énergivores, le bitcoin nécessitant aujourd’hui, à l’échelon mondial, autant d’électricité qu’un pays comme la Suisse, ainsi que nous le rappelle le mathématicien Jean-Paul Delahaye ! Plus généralement, travailler dans le cloud – c’est-à-dire utiliser des serveurs distants – ne doit pas être un prétexte pour négliger les problèmes d’environnement car c’est toujours mobiliser quelque part des centres de calcul très énergivores. Nous avons donc la responsabilité de revisiter régulièrement nos pratiques pour être sûrs de ne pas consommer trop. À cet effet, Asdaex réalise un audit avec une société externe afin d’évaluer la bonne utilisation de ses infrastructures informatiques et de les optimiser si c’est possible. Pour chacun de nos projets, par exemple, nous créons un espace digital où est stockée toute l’information utile ; il n’est cependant pas possible de faire cela pour chaque projet, en laissant exister les anciens. Un système d’archivage permet donc de consommer moins.
Asdaex, c’est un autre aspect spécifique de notre métier, conseille également à ses clients des architectures informatiques adaptées à de nouvelles installations, lorsqu’il s’agit de nouvelles usines par exemple. La consommation énergétique doit être inscrite dans la logique même de ces architectures. À sécurité égale, nous conseillons le coût environnemental le plus acceptable. L’industrie que nous servons jouit de belles marges financières et sa capacité d’investissement permet une réflexion très approfondie en matière de responsabilité sociétale. Ainsi, la prise de conscience, believe it or not, est-elle très forte dans le secteur pharmaceutique de notre pays ! Sans doute parce que les gens qu’il emploie sont, en interne, de véritables acteurs de la cause… De manière plus générale, un gain énergétique important peut être fait en revisitant les méthodes de production. Les entreprises pharmaceutiques le font et mettent en place de véritables indicateurs de performance non-financiers qu’elles n’hésitent pas à communiquer et qui sont de nature à acquérir de plus en plus d’importance. C’est donc, de leur part, un engagement véritable, ce qui est rassurant. De manière plus générale encore, pareille démarche demande bien sûr un peu d’investissement. Mais peut-être le choc énergétique que nous vivons actuellement forcera-t-il encore davantage de décideurs à se préoccuper de ces questions ? Quelles que soient finalement leurs motivations, pourvu que cela soit bon pour la planète… »

Les valeurs de l’entreprise

« Nous devons tous lutter contre les coûts environnementaux cachés, s’insurge Francis Martin ! L’impact de la culture de la consommation immédiate de ces trente dernières années doit absolument être rendu visible pour les consommateurs. Regarder une série sur l’une des plateformes disponibles ? Quelle difficulté y aurait-il à patienter quelques jours ou à optimiser le transport des marchandises ? À acheter un support physique plutôt que de regarder « en direct » – avec une qualité d’image parfois médiocre qui est, à mes yeux, un recul de vingt ans… L’ensemble des plateformes de téléchargement, sans parler de contenus « moins recommandables », représentent une portion extrêmement importante de la bande passante, selon l’Institut Belge du Numérique Responsable ! Il y a vraiment matière à s’interroger sur cette consommation énergétique aberrante…
Chez Asdaex, sûrs que les petits ruisseaux font les grands fleuves, nous tablons sur de petites initiatives, en sensibilisant, par exemple, nos collaborateurs à travers des commandes de fruits – chacun bénéficiant, par ailleurs, de chèques-repas. Ces fruits bio et locaux – même si nous avons parfois des bananes – sont également de saison, cela va de soi, mais nous prenons soin de bien expliquer la démarche, à tous et à chaque fois… Et c’est pareil s’agissant de l’hôtel à insectes que nous avons installé, en collaboration avec Nature & Progrès. Nous en expliquons longuement les tenants et les aboutissants. Nous sommes une société en forte croissance et nous accueillons donc beaucoup de nouveaux collaborateurs qui nous interrogent sur les valeurs de l’entreprise. Notre valeur essentielle est la confiance ! Et au-delà, viennent la transparence, la communication, le respect de la parole donnée… Les questions environnementales, tout comme les questions de genre, sont ainsi régulièrement abordées. Le nombre de femmes engagées – et, par conséquent, la diversité de la réflexion au quotidien – est important pour notre entreprise et nous nous efforçons en permanence d’en recruter davantage, même s’il est plutôt difficile d’en trouver dans les métiers de l’automation, de l’informatique industrielle, etc. Je dirais, mais c’est peut-être affaire de perception, qu’elles sont plus sensibles que les hommes aux questions écologiques, ce qui est positif pour nous car cela transforme notre regard sur les choses et nous assure une large diversité d’idées nouvelles…
Nous avons, chaque jeudi, une « happy hour » où chacun s’exprime et échange librement ; les idées fusent et circulent. Nous organisons aussi un « événement » collectif, trois fois par an, où je veille à ce qu’ils ne se passe jamais dans un esprit de compétition – jamais de classements, de vainqueurs ni de perdants… – car nous privilégions les comportements coopératifs, et non les comportements compétitifs. Ce sont toujours des moments qui me permettent de discuter, avec l’un et l’autre, de manière informelle. Le choix d’un cadre naturel génère souvent des réflexions originales et des questionnements nouveaux qu’il faut être capable d’entendre… Quelqu’un m’a dit : il faudrait faire un compost pour les déchets organiques de la maison ! J’ai trouvé l’idée excellente et j’ai demandé à cette personne de venir me trouver si elle avait besoin d’un budget – Asdaex dispose, à cet effet, d’un budget en relation avec le bien-être au travail… Beaucoup d’idées apparaissent mais il n’y a pas toujours quelqu’un pour les prendre en charge. Certains comportements peuvent être imposés – les gobelets en plastique, par exemple, ont été remplacés par des bouteilles réutilisables – mais c’est encore beaucoup mieux si un projet qui suscite l’adhésion trouve quelqu’un qui a envie de s’y investir pour le bien de tous. J’apprécierais que ce genre de choses – mise en œuvre incluse – reflète vraiment une volonté collective, plutôt que d’être perçue comme un service rendu par l’employeur, au risque de se banaliser rapidement… »

Le vent de tempête qui brise le moulin

« Asdaex, conclut Francis Martin, ne sera jamais une société cotée en bourse car nous voulons continuer à maîtriser, nous-mêmes, les orientations importantes. La croissance de l’entreprise n’a jamais été un objectif à nos yeux ; nous visions une vingtaine de collaborateurs, endéans les trois ou quatre ans, afin d’être crédibles économiquement. Nous sommes soixante-quatre ! C’est dû au succès de nos projets chez nos clients, pas à la volonté de croître pour croître. Nous suivons une logique à moyen terme de respect et de confiance. Nous ne recrutons pas de mercenaires… Asdaex tient à se prémunir de ce qu’on nomme le treadmill effect : le vent entraînant un moulin, lui permettant d’acquérir une certaine vitesse… Mais les actionnaires de sociétés cotées en bourse veulent toujours un peu plus et font tourner le moulin toujours un peu plus vite. Si vite qu’à la fin, il risque de voler en éclats ! L’efficacité opérationnelle a souvent, en contrepartie, un coût humain. Plus l’entreprise est grande, plus ce coût humain est anonymisé par le nombre d’employés : s’il y en a beaucoup, impossible de les connaître tous.
En tant qu’économiste, je connais évidemment tout ce qui est effet d’échelle. Tout n’est évidemment pas compatible avec la petite entreprise. Fabriquer des voitures de série sans grandes entreprises n’est pas envisageable, raison de plus pour que la dimension environnementale et de respect de la planète y soit extrêmement présente. Une dimension qui est cependant beaucoup plus facile à installer dans une petite entreprise, pour peu que les patrons y soient sensibles… Sans doute faut-il aussi conserver une confiance suffisante dans la technologie. Elle rend d’énormes services pourvu qu’on lui pose les bonnes questions. Elle n’est jamais que ce qu’on en fait, n’étant pas intelligente en tant que telle… Ce qui nous ramène immanquablement à nos valeurs et à nos responsabilités. Ici et maintenant… »

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Honesty – www.honesty.be
Une tribu de spécialistes, un autre regard sur l’immobilier

« J’ai personnellement été atteint par la maladie de Crohn, une inflammation du tube digestif, explique Ludovic Guiot, administrateur-délégué d’Honesty. Ayant pu constater l’impact sur mon propre corps d’une nourriture mal appropriée, j’ai prêté une meilleure attention à mon alimentation et à mon hygiène de vie. Une réflexion plus globale sur l’environnement a naturellement suivi et est devenue une véritable démarche familiale. Ma conception du plaisir a également évolué et je m’efforce, autant que possible, d’écarter de ma vie tout ce que je n’aime pas. Deux choses ont donc fait que ma maladie est en rémission : qualité de la nourriture et bonheur d’aller vers ce qui me plaît. Beaucoup de gens ne mettraient jamais une essence frelatée dans leur réservoir mais n’hésitent pas à se nourrir de façon déplorable… »

Les lois de l’attraction

« En tant que patron d’entreprise, poursuit Ludovic Guiot, je m’efforce aussi d’amener mes collaborateurs à éviter ce qui ne leur plaît pas dans leur job. Cela peut sembler étrange mais cette réflexion est pourtant fondamentale : si le travail ne convient pas, pourquoi ne pas en changer ? Ouvrir de telles perspectives est une excellente manière d’améliorer le confort des collaborateurs. Les mentalités doivent évoluer : il faut arrêter d’être dans le devoir, dans le paraître, et il faut, pour cela, identifier correctement sa propre envie et savoir où on est bon. C’est d’ailleurs souvent lié ; il est clair que, si on aime, on sera bon dans ce qu’on fait. Et le reste suivra, je crois aux lois de l’attraction. Nous sommes des moteurs pour tout ce qui nous arrive de positif et de négatif mais il n’est pas toujours aisé de le faire comprendre à notre entourage : famille, amis, collègues… Il ne faut donc pas craindre d’amener autrui à de telles réflexions. En tant que patron, je dois le demander à ceux que j’emploie : peut-être n’est-ce plus la fonction ou l’entreprise qui te conviennent ? Je dois aussi ouvrir la possibilité de réfléchir autrement. C’est pourquoi Honesty travaille avec une association nommée Emploi Mode d’Emploi (EME) – www.eme-conseil.be – qui recherche les modalités de l’épanouissement personnel dans l’entreprise et, par conséquent, une amélioration du travail.
Mieux encore : Honesty va entamer un grand virage, dès le début de l’année prochaine ! Nous voulons nous réorganiser afin qu’il n’y ait plus un responsable ultime mais que des pôles de compétences soient mis à la disposition de tous et que l’autonomie de chacun soit accrue au point de faire disparaître, à terme, toute forme de structuration hiérarchique. Je vous invite, à ce sujet, à lire Reinventing Organizations, de Frédéric Laloux – une version traduite, résumée et illustrée, est disponible aux éditions Diateino -, dont l’idée est d’évoluer vers des fonctionnements de ce type. Pour améliorer le travail de chacun, il ne suffit pas de mettre un billard ou un kicker dans la cafétaria – je caricature – mais il faut laisser la liberté d’action la plus étendue possible aux collaborateurs et ne pas laisser planer l’impression que quelqu’un est susceptible, à tout moment, de les contrôler… Nous voyons aujourd’hui, chez Honesty, à quel point nos collaborateurs sont jaloux de leur autonomie. Trop de gens ont encore souvent, dans leur tête, l’impression qu’une telle autonomie n’est pas légitime. Il faut absolument réagir, face à de telles peurs, en mutualisant la réflexion, en rendant plus disponibles les ressources liées à des fonctions ou à des compétences, de sorte que n’importe quel collaborateur n’ait plus jamais besoin du patron pour arriver à la bonne décision. »

Priorités et valeurs

« Avant cela, n’importe quelle « boîte » doit évidemment définir ses priorités, ses valeurs. Chez Honesty, affirme avec fierté Ludovic Guiot, c’est la bienveillance ! Quelqu’un d’hyper-compétent, mais qui n’est pas bienveillant, n’a pas sa place chez nous. C’est la base. Le métier, ensuite, devient une sorte de la logistique… Je n’avais jamais imaginé qu’Honesty serait une entreprise avec onze bureaux et une quarantaine de collaborateurs. Ce sont les opportunités, les rencontres de personnes amenant des projets, qui décident du destin d’une « maison » comme la nôtre. Et pas une stratégie déterminée de longue date. Il me semble donc préférable, dans cet esprit, que les décisions et les évaluations se fassent entre collègues : fixer, par exemple, de nouveaux objectifs à qui est insuffisant ou irrespectueux, ou carrément prier cette personne d’aller voir ailleurs… Nous n’engageons jamais sur base d’un diplôme ou de compétences spéciales mais surtout sur base de la personnalité. Et, par rapport au métier spécifique de l’immobilier, nous formons nous-mêmes ces nouveaux arrivants. Neuf personnes sur dix sont dans cette situation-là, chez nous…
Il est confortable de rester dans ses habitudes. Faire partie de ceux qui décident de fonctions et de priorités paraît trop ardu à beaucoup de gens qui n’y sont pas prêts. Nous devons donc d’abord déterminer comment bien négocier ce tournant. Honesty veut avant tout conserver son humanité, même si le structure grandit. Aux Pays-Bas, la première entreprise de soins de santé à domicile emploie plusieurs milliers de personnes mais tout se fait en autonomie, jusqu’à former la concurrence pour lui expliquer ce qu’il faudra faire demain… La volonté, au lieu d’expédier simplement les gens dans des homes, est d’amener tous ceux qu’elle sert à davantage d’autonomie, en expliquant, par exemple, comment renforcer les liens avec la famille et les voisins. Toutes les questions émanant du terrain peuvent être posées par des groupes d’infirmiers, à des juristes ou à des médecins, sans qu’aucune structure pyramidale n’existe pour diriger tout cela… Le « boss » n’est plus là que pour certaines questions d’ordre très général. Et ceci est possible, même dans des « boîtes » de très grande taille…
Nous axons notre communication sur la « tribu Honesty » afin de souligner notre grande solidarité interne, dans un monde de l’immobilier qui est encore très concurrentiel, où les commerciaux, dans certaines entreprises, se bagarrent entre eux pour s’arracher les affaires… Ce n’est pas le cas chez nous ! Toutefois, l’inconvénient de la tribu, c’est que ses membres sont parfois plus durs encore que ne le serait le patron : un nouvel engagé doit prouver, par exemple, qu’il mérite bien de faire partie de la communauté. D’une manière générale, la tribu sanctionne beaucoup plus vite… »

S’adapter au monde qui change

« Aujourd’hui, les gens veulent de la liberté, de l’autonomie, constate Ludovic Guiot, travailler à temps partiel afin de garder du temps pour eux. Pourquoi serait-ce un problème, du moment que le travail est fait ? Aller chez le dentiste avec un enfant ? Chez nous, il ne faut même pas en faire la demande, ni même prendre congé… L’organisation du travail ne doit plus être du ressort de patron. Et c’est faisable dans toutes les entreprises mais, pour cela, il faut avant tout de la pédagogie, il faut changer la culture de travail. La rentabilité doit évidemment toujours être au rendez-vous mais n’est-ce pas justement cette souplesse, cette légèreté qui rend aujourd’hui le travailleur plus efficace dans son boulot ? Comment ce travail doit-il être évalué ? Chez nous, pas de chiffres, personne n’a d’objectif ! Le rapport humain est toujours prépondérant, ainsi que les rapports avec les clients. Je n’évalue donc personne individuellement mais le brainstorming est collectif sur ce qu’il est nécessaire d’améliorer.
Quel est le service qu’un agent immobilier peut rendre ? Notre rôle est d’abord de donner les bons conseils par rapport à un patrimoine. Garder ou vendre ? Quel est le prix de vente idéal ? Comment aborder la vente, en scindant, par exemple, le bien pour mieux le valoriser ? Il faut toujours, après réflexion, préférer le bon conseil au conseil intéressé, opter pour la relation à long terme dans l’intérêt du client…
Quand des collaborateurs qui ont de vraies compétences quittent l’entreprise, eh bien, c’est terrible pour l’entreprise ! Mais si ces mêmes collaborateurs s’épanouissent dans l’entreprise et peuvent être partie prenante de son destin, quelles raisons auraient-ils encore de la quitter ? Je pense donc que notre nouvelle organisation sera très attractive pour des gens qui arrivent dans le métier que nous faisons. Or l’enjeu principal aujourd’hui est justement de trouver les bonnes personnes. Et nombreux sont ceux qui acceptent à présent, de renoncer à une partie de leur salaire pour des questions de valeurs… Mieux encore : plusieurs patrons de PME – en électricité, chauffage, peinture – ont postulé, ces derniers mois, chez Honesty, alors que leur entreprise tournait bien. Ils peinent à trouver des gens formés ! Et les candidats ne manquent pourtant pas mais ce sont les formateurs, qualifiés et passionnés, qui font aujourd’hui défaut. Il est urgent de réfléchir autrement, en offrant d’autres perspectives au maçon, par exemple, dont on sait très bien que la pénibilité du métier ne lui permettra pas de travailler sur chantier jusqu’à soixante-sept ans. D’autres, à quarante-cinq ans, souhaitent changer de métier mais ne peuvent pas se le permettre financièrement… Pourquoi ne pas leur assurer un revenu ? »

La solidarité fera la différence

« Nous regrettons que le public, d’une manière générale, soit encore insuffisamment sensibilisé à ces questions, conclut Ludovic Guiot. Nous-mêmes devons mieux communiquer à ce sujet car on imagine rarement que l’écologie et l’aspect humain des choses puissent toucher une société immobilière. Mais il faut dire que le milieu de l’immobilier a été considérablement assaini depuis vingt-cinq ans… L’écologie est avant tout une histoire d’humanité. Je me souviens d’une réflexion de Pierre Rabhi qui place le respect de l’humain au centre, tout le reste n’étant que conséquences logiques. J’ai entendu dire qu’aujourd’hui, 70% des Belges font un job qu’ils n’aiment pas. C’est souvent une question d’éducation car on formatte, dès l’école, sur base de notes largement arbitraires, on drille à une performance qui est pipée d’avance. Et tout est à l’avenant : vous devez mériter à l’égard des autres ! Certes, il faut du courage mais, quand on aime vraiment ce qu’on fait, est-ce encore bien du courage ? En tant que parent, comme en tant que patron, c’est de voir les individus se « casser la gueule » qui est terriblement dur. Nous pouvons juste nous efforcer qu’un problème ne se répète pas, chercher la pédagogie ou la formation continue adéquates, donner à la personne le moyen de trouver elle-même la solution qui lui convienne…
Je pense donc que le travail en groupe permet d’oser davantage, induit des processus de correction plus crédibles et plus efficaces… Alors qu’être morigéné par la hiérarchie est toujours absolument contreproductif. Le rôle du patron aujourd’hui est difficile à jouer, à tel point que je me présente souvent comme un simple collègue. « Un collègue qui décide », dis-je alors sous forme de boutade… Sûr que c’est toujours la solidarité qui fera la différence ! »

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Civadis – www.civadis.be
Solutions IT pour les autorités locales

 » Depuis quelques années, raconte Marc Breuskin, directeur des projets spéciaux et des partenariats, Civadis s’engage dans une action sociale liée aux cadeaux de fin d’année qui sont destinés à remercier notre clientèle. Nous demandons à notre personnel de faire des suggestions d’actions à caractère local et construites autour d’objectifs précis. Nous examinons alors, avec leurs promoteurs, comment y associer Civadis et c’est ainsi que nous avons fait le choix de Nature & Progrès afin de présenter une démarche en faveur de la biodiversité menée en commun : l’installation d’hôtels à insectes dans le cadre du Plan Bee. Une communication spécifique fut réalisée, en complément des cadeaux, et nous développons aussi, avec nos employés, les raisons qui motivent notre choix, un représentant de l’association partenaire étant ainsi convié afin d’en parler, ce qui peut inciter, si elles le souhaitent, les personnes concernées à prolonger la démarche… Soucieux de choisir nos cadeaux dans un cadre d’économie locale, nous optons souvent pour du chocolat, ce qui permet un vrai partage chez nos partenaires plutôt que de concerner exclusivement l’une ou l’autre personne…
Nos clients sont essentiellement des pouvoirs locaux, notre travail consistant à leur fournir des logiciels adaptés à leurs besoins. Ces logiciels sont installés sur leurs propres machines et nous ne pouvons donc qu’être de bon conseil en ce qui concerne les consommations énergétiques, dans le cas d’utilisations éventuelles de datacenters, sans que cette problématique concerne directement Civadis. Notre maison-mère en possède, quant à elle, et vient d’installer une éolienne afin de viser le bilan le plus neutre possible. Nous faisons nous-mêmes, bien entendu, très attention à nos propres consommations et à tout ce qui concerne l’ajustement, après la pandémie, de notre espace de travail qui est relativement grand. Nous réfléchissons aussi à l’introduction de nouvelles sources d’énergie, telles que les panneaux solaires… »

Adapter la politique de mobilité

« La question du sens, précise Sophie Demoitié, directrice financière et des relations humaines, oriente le choix que fait notre comité de direction pour la thématique associée aux cadeaux de fin d’année. Or les défis écologiques préoccupent toujours plus nos collaborateurs. Il est donc important qu’une société comme la nôtre mette l’accent sur les problématiques sociétales et environnementales. Cette image positive est destinée bien sûr à notre clientèle mais elle réaffirme aussi, en interne, les valeurs auxquelles Civadis est très attaché. Nos plus jeunes collaborateurs sont particulièrement sensibles à ces questions, l’évolution des mentalités est très claire à sujet. Sans aller jusqu’à donner toutes priorités à l’environnement, les candidats à l’engagement chez Civadis nous interrogent régulièrement sur le sens que nous donnons aux fonctions proposées. Nous travaillons principalement pour les communes et les CPAS – et donc pour la population dans son ensemble -, nos priorités sont donc naturellement orientées vers le service public et vers le local.
Nous réfléchissons, Marc l’a évoqué, à investir dans le photovoltaïque et à mettre en place des systèmes originaux permettant à nos collègues d’orienter davantage leurs choix de mobilité vers des vélos ou des véhicules électriques. Tous pensent spontanément, par exemple, sur ces questions, à recourir davantage à des véhicules partagés. Le cadre de travail dont Civadis est propriétaire, à Rhisnes près de Namur, est très verdoyant et très aéré mais est malheureusement mal desservi par les transports en commun. Afin d’innover dans notre politique de mobilité, nous avons donc adressé un questionnaire à tous les collaborateurs afin de mieux comprendre leurs souhaits et leurs usages réels, les habitudes de mobilité qu’ils seraient prêts à modifier, ou même s’ils seraient éventuellement prêts à déménager pour bénéficier de conditions de travail différentes… Les résultats de cette enquête et l’analyse de l’état de notre flotte actuelle de véhicules nous permettra de proposer une gamme de solutions que chacun pourra combiner en fonction de son cas particulier. Nous évoluerons également, dans notre plan de rémunérations, en ne proposant plus systématiquement le véhicule de société. Nous sommes aussi très attentifs au bien-être des collaborateurs : l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle, par exemple. Nos différentes antennes – Marche, Leuze-en-Hainaut et Herstal – offrent également des solutions aux collaborateurs qui viennent de loin. Nous mettons donc au point une sorte de « plan cafétaria » où la voiture serait davantage comprise comme un outil parmi d’autres. La pertinence du passage à l’électricité de notre flotte de voitures de société reste, pour l’heure, très complexe à évaluer, concernant notamment l’aspect fiscal et vu le coût d’un véhicule électrique, en regard de la valeur de revente de nos véhicules à moteurs thermiques. Chez nous, la voiture reste un véritable outil de travail, beaucoup de collaborateurs se rendant quotidiennement en clientèle, mais à partir de juillet 2023, quoi qu’il en soit, nous passerons à l’électrique. Le rechargement – notamment pour ceux qui habitent en appartements – reste une question complexe, le planning de charges devant être plus structuré que pour les voitures à essence. Pour l’heure, Civadis est équipé de deux doubles bornes et le passage général à l’électricité ne pourra se faire qu’avec l’installation d’un réseau plus important, c’est pourquoi nous pensons à construire un carport muni de panneaux photovoltaïques et d’un nombre de bornes nettement plus conséquent. »

Des évolutions rapides

« Recharger la voiture sur le réseau, quand on rentre chez soi, est évidemment toujours le mauvais choix, précise Marc Breuskin, car c’est aussi le moment où l’électricité coûte le plus cher. Celui qui dispose de panneaux photovoltaïques a tout intérêt à recharger ses batteries, pendant l’après-midi, quand rien d’autre ne tourne chez lui. Un bon schéma serait peut-être d’équiper les surfaces de parkings en panneaux photovoltaïques – dans les supermarchés, par exemple -, de manière à recharger des batteries qui y seraient disponibles. Ceci permettrait sans doute de mieux adapter la consommation à la production électrique. Nous sommes encore dans une phase pilote à cet égard et il est certainement un peu tôt pour faire déjà des choix trop catégoriques, dans la mesure où la technologie – et notamment l’autonomie des voitures – évoluent à grand pas. J’ai eu vent, par exemple, d’un projet où un robot de chargement vient se coller aux voitures en stationnement sur un parking…
Le télétravail est un des outils qui a également évolué très vite, et les solutions qu’il offre sont aujourd’hui pleinement exploitées pour nos réunions. Toutes nos salles sont équipées de systèmes performants. Civadis offre aussi, à ses collaborateurs, la possibilité de trois jours de télétravail par semaine, ce qui est très apprécié même si de nouvelles questions se posent en matière d’esprit d’équipe et de consolidation des liens sociaux. Les logiciels que nous proposons intègrent aussi, de plus en plus, les outils digitaux, à l’intention des administrations que nous servons afin de gérer leurs propres process. Tout ce qui est factures, bons de commandes, etc. est aujourd’hui systématiquement dématérialisé. Tout ce qui peut être récupéré via des messageries permet d’éliminer beaucoup de papier. L’amélioration du dialogue entre citoyen et administration est également au cœur de nos produits, ce qui contribue également à donner du sens au travail qu’offre Civadis : il ne s’agit pas uniquement d’outils de base mais d’une modernisation complète du contact avec les institutions, dans l’intérêt de tous nos concitoyens. Travailler pour nous consiste donc à rendre un réel service à la population. Mais, attention, proposer une solution ne la rend pas pour autant exclusive et chacun doit rester libre de ne pas accepter les solutions électroniques ; ceux qui ne sont pas prêts doivent pouvoir continuer à recevoir les différents éléments de manière traditionnelle. Ajoutons enfin que Civadis change très régulièrement de matériel informatique qui ne reste, chez nous, qu’entre trois et cinq ans. Nous disposons ainsi d’équipements que nous donnons à des écoles ou à des associations. Ce matériel reste adéquat pour l’usage qui en sera fait, même s’il ne correspond plus à nos standards professionnels de performance…
Chacun d’entre nous est acteur d’avenir, conclut Marc Breuskin ! Il ne faut pas attendre spécialement que les politiques ou les entreprises « fassent quelque chose ». Chacun doit « faire quelque chose ». Un peu d’attention suffit pour ne pas subir le changement. »

Nul doute, à présent, que le capital humain soit la ressource essentielle de l’entreprise citoyenne. Ce constat implique donc clairement que le facteur de changement de nos entreprises soit la bienveillance qu’elles témoignent à l’humain, bien plus que la course au profit. Cette course aujourd’hui les épuise, la valorisation de la compétence humaine au contraire les régénère, les fait revivre. Encore un logiciel à modifier d’extrême urgence…