Cet article est paru dans la revue Valériane n°176
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Par Chantal Van Pévenage,
membre jardinière chez Nature & Progrès
Avez-vous déjà entendu parler du biochar ? Son utilisation se répand lentement chez les agriculteurs et chez les jardiniers. Pourtant, ses atouts ont été démontrés par des recherches empiriques. Découvrons ensemble comment l’utiliser et les bienfaits qu’il apporte aux sols.

« L’humus est la base de notre vie terrestre. Il est textuellement son début et sa fin. Il se crée par la vie et la vie est créée par lui », énonçait Rudolf Koëchli, agronome pionnier en maraîchage biologique depuis 30 ans à la Ferme Arc en Ciel de Wellin. Les terres agricoles et celles de certains jardins en manquent aujourd’hui ou sont pollués. Certaines cultures ne poussent pas harmonieusement ou ne contiennent plus suffisamment d’éléments nutritifs. Les sécheresses à répétition menacent les écosystèmes fragiles des sols. Le lessivage emporte de nombreux éléments nutritifs… Des expérimentations ont prouvé que le biochar peut apporter une réponse à ces enjeux.
C’est quoi, le biochar ?
Le biochar est produit par chaudière à pyrolyse à partir de déchets de biomasse (matières végétales diverses comme les déchets de taille, de paille, les drèches de brasserie, le fumier, l’écorce, les plaquettes de bois…) ayant subi un traitement de carbonisation. Ce procédé limite la présence d’oxygène afin d’éviter l’oxydation et permet une combustion très lente. Le biochar n’est pas un charbon, ni un fertilisant. Il doit toujours être chargé de matières organiques, comme du purin de plantes, du fumier composté, du lisier, du compost, du bokashi, de l’urine… Sans cela, il pourrait créer temporairement un déficit nutritif pour les plantes. Le biochar présente la particularité de rester dans les sols.
Qu’apporte-t-il ?
Le biochar accélère la formation d’humus. Sa qualité essentielle est sa grande porosité. Il retient plusieurs fois son poids en eau et fait donc office « d’éponge ». Dans ses pores, il abrite aussi des micro-organismes qui participent à la minéralisation et améliorent la vie biologique du sol. La création des racines est favorisée. Sa microstructure séquestre du carbone présent dans l’air en le stockant à long terme dans les sols en évitant le lessivage. Le biochar est aussi un « restructurateur ». Par exemple, il rend les sols argileux moins compacts et permet de mieux drainer les surplus d’eau. Il retient les nutriments des terres sablonneuses. Son pH élevé permet de contrer les effets négatifs de l’acidité de certains sols. Ses effets se marquent durant des centaines d’années, si bien que dans certains sols, on ne l’applique parfois qu’une fois. D’après les observations, il augmente le rendement des cultures, permet d’éliminer les engrais, retient les odeurs d’ammoniac et peut être utilisé en dépollution des sols en immobilisant des métaux lourds (à l’exception de l’arsenic). Enfin, le biochar accélère le compostage.
Où et quand l’utiliser ?
En élevage, le biochar accélère la décomposition du lisier et réduit les odeurs. Il est aussi utilisé comme additif dans l’alimentation des ruminants pour réduire les émissions de méthane (tests lancés en France dans le courant de 2025). On en dispose dans les cuves de récupération d’eau de pluie servant à abreuver les animaux pour garder une eau claire et propre. En culture, le biochar est utilisé de préférence en automne ou au tout début du printemps comme amendement agricole, maraicher, horticole, dans les potagers, les vignobles, les pépinières, les cultures forestières, les golfs et gazons.
Comment l’utiliser ?
L’utilisation du biochar n’est pas une science exacte. Les sols sont différents. Une proposition serait de tester les effets qu’il produit et d’observer. Comme dit précédemment, il faut toujours qu’il soit « chargé » d’un « aliment ». On préconise donc de mélanger le même volume de biochar et de matières organiques et de laisser reposer une semaine pour les amendements solides et un jour en trempage pour du lisier, du purin de plantes ou de l’urine afin que les cavités du biochar soient bien remplies.
Dans les potagers, épandre un litre de mélange par mètre carré en l’enfouissant légèrement au croc dans les premiers centimètres du sol. En fonction des résultats obtenus, reproduire les années suivantes. A un moment donné, le sol aura reçu suffisamment de biochar et il ne faudra plus en apporter. Ce sont nos observations qui permettront de juger s’il faut continuer à charger le sol. Pas besoin d’en gaspiller ! Les effets se feront ressentir plus rapidement sur les sols ingrats.
Au moment de la plantation d’arbres fruitiers, baigner les racines durant 24 heures dans un mélange de dix litres de biochar pour dix litres de lisier, d’urine ou de purin. En entretien des arbres fruitiers, en automne ou au printemps, dégager autour du tronc, en tenant compte de la couronne des arbres, griffer et apporter un mélange d’un litre de biochar pour un litre de matières organiques autour du tronc. Recommencer éventuellement les années suivantes selon les besoins des arbres. Pour la pelouse, épandre directement un mélange d’un litre de biochar pour un litre de purin de consoude pour cinq mètres carrés.
Bien le choisir
Avant d’acheter du biochar, soyez vigilant sur le choix du fabricant et l’origine du produit. Il faut, en effet, s’assurer qu’il possède bien la certification européenne. La production du biochar liée à certains procédés de fabrication peut donner un produit fini dans lequel certains métaux lourds ou d’autres contaminants, en fonction de la matière première utilisée et des conditions de pyrolyse, peuvent se trouver. Il en résulte un risque de pollution des sols. Le biochar peut être issu de bois ou de matière ligneuse et aura, dans ce cas, une bonne concentration de carbone. Il peut aussi être issu d’herbacées comme du foin : il sera alors plus faible en carbone mais contiendra de nombreux autres éléments.
REFERENCES
http://www.pronatura.org/fr/biochar/
Vous souhaitez en savoir plus ? Un événement est organisé sur le sujet les 12 et 13 novembre 2025 à Nassogne par le Mouvement d’action paysanne, Terre nourricière, le Centre de Michamps, Terraé, la commune de Nassogne, le CER Groupe, avec le soutien de la Région wallonne. Entrée libre et gratuite, inscription obligatoire. Pour en savoir plus : gaahumus@gmail.com.
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